Entre racisme et xénophobie, la tradition familiale perdure. La fille du président sortant l'emporte très nettement sur son concurrent Bruno Gollnisch avec 67,65% des voix, à l'issue du vote interne des militants. Son élection fait d'elle la candidate naturelle du parti à l'Elysée en 2012. Au total, 17.127 militants ont pris part au vote sur les 22.403 inscrits, a détaillé Jean-Marie Le Pen, soit un taux de participation de 76,45%. Prenant la parole immédiatement après l'annonce, Bruno Gollnisch a adressé ses «chaleureuses félicitations à sa rivale» et estimé que «quand on participe à une consultation on en admet le résultat.» Officiellement proclamés hier matin, les résultats du scrutin n'ont surpris personne, dans le hall du Palais des congrès de Tours. «Cela fait un an qu'elle s'attendait à un score d'une telle ampleur», a déclaré Wallerand de Saint-Just, trésorier du FN. La première tâche de la nouvelle présidente consistera justement à mettre en place la nouvelle équipe dirigeante. «Il ne reste que des ajustements minimes à faire», a-t-elle assuré. La victoire de Marine Le Pen annonce sans doute l'arrivée aux commandes du parti d'une nouvelle génération de jeunes, n'ayant connu ni la Seconde Guerre mondiale ni les événements d'Algérie. elle est surtout pressée de sortir de la marginalisation politique pour parvenir au pouvoir. Marine Le Pen affirme sa volonté, dans le cadre du renouveau des priorités du Front, de «rompre» avec «les mauvaises polémiques». Référence implicite aux outrances verbales qui ont valu des poursuites judiciaires à son père; au profit des «bonnes polémiques: celles qui visent à attirer l'attention sur des sujets actuels, des problématiques actuelles, des préoccupations essentielles du peuple français». L'intention y est certainement, mais dans la pratique, Marine marche sur les pas de son père. Effectivement, Marine Le Pen, accusée de racisme et de xénophobie, fait l'objet d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Lyon, depuis une semaine, et ce après qu'elle eut assimilé les prières de rue des musulmans en France à l'Occupation allemande. Un changement de stratégie s'impose pour Marine, elle doit tenter de couper avec la politique extrémiste de son père si elle veut espérer dépasser le premier tour des élections de 2012. «Pendant longtemps, on a voulu (...) limiter l'audience du Front national à des sujets comme l'insécurité ou l'immigration, et de fait les Français connaissent très mal le programme économique et social du Front national», a souligné Marine Le Pen. En acquérant cette «visibilité», la nouvelle présidente du FN dit rechercher «une écoute chez des nouveaux électeurs qui pourraient être intéressés par notre vision de l'économie, dans laquelle est incluse notre vision de l'Homme aussi», avec un objectif: atteindre le second tour de l'élection présidentielle de 2012. En cherchant à justifier les propos et les revendications de son mentor, qui ont choqué l'opinion publique, surtout lors de la campagne électorale de 2002, où le Front national s'est vu accéder au second tour de l'élection présidentielle, Marine tente de jeter la pierre aux autres, en condamnant la mauvaise interprétation et les diffamations proférées contre le discours du Front national. «En pillant notre discours, Sarkozy nous a affaiblis, mais à moyen terme, c'est nous qui en sortirons renforcés: grâce à lui, nous avons, en grande partie, été dédiabolisés», affirme alors cette avocate de profession, qui s'efforce d'assouplir certains points du programme du parti, comme l'opposition à l'avortement par exemple. La fille du président d'honneur du FN aurait aimé pouvoir éviter, avec soin, toute accusation de racisme, de xénophobie ou d'antisémitisme, cela dit, avec toute la bonne volonté du monde, on ne peut aller contre sa nature. L'élection de Marine Le Pen à la tête du Front national substitue au «porteur d'un discours de haine», la «porteuse d'un discours de haine», déclare Dominique Sopo, président de SOS Racisme, dans un communiqué diffusé samedi dernier.