Marquant cette opposition, trois ministres appartenant à la Centrale syndicale tunisienne Ugtt, et un autre du Forum démocratique, ont démissionné, hier, du gouvernement de transition. La rue tunisienne bouillonne encore. Jaloux de leur révolution, les Tunisiens désavouent sa confiscation par les caciques du régime déchu. Des milliers de manifestants sont sortis dans les rues de Tunis et de plusieurs villes tunisiennes pour exiger le départ des ministres issus du gouvernement Ben Ali, destitué vendredi. De fait, marquant cette opposition au compromis avec des représentants de l'ancien régime, les trois ministres appartenant à la Centrale syndicale tunisienne Ugtt, ont démissionné hier, du gouvernement de transition. Le chef de l'Union générale des travailleurs tunisiens (Ugtt), Abelsalam Jerad, justifie ce retrait par la présence au gouvernement «des barons de l'ancien régime qui avaient participé à la répression et à un système de dictature». De nombreuses voix s'élèvent en Tunisie, notamment au sein de la gauche et de la mouvance islamiste contre la présence de membres de l'ancien gouvernement et du parti du président déchu Ben Ali dans la nouvelle équipe de transition. «Les ministres de Ben Ali doivent partir!», scandaient hier les manifestants dans les rues de la médina de Tunis. Beaucoup estiment que le départ du président déchu ne suffisait pas et qu'il fallait des hommes nouveaux au pouvoir. «Ben Ali est en Arabie Saoudite, mais son gouvernement est toujours en place!», relevaient dans le même temps des manifestants dans le centre-ville. Ils protestaient contre la présence au sein du nouveau gouvernement de membres du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti de l'ancien chef d'Etat. Ils ont été violemment dispersés par la police. «Il faut des gens nouveaux, c'est la moindre des choses. Des gens nouveaux, il n'y a que cela en Tunisie, on a une élite qui peut gérer le pays», commentaient les manifestants. Tandis que d'autres indiquaient qu' «Il y a plusieurs personnes intègres dans le nouveau gouvernement. Il faut maintenant de la stabilité. On veut être libres, mais aussi en sécurité», quand d'autres jugent que «le gouvernement est provisoire, il est composé de gens qui ont de l'expérience et qui peuvent gérer les affaires publiques. Mais après les élections, ils laissent les clés sous le paillasson et ils dégagent». Le Premier ministre tunisien, Mohammed Ghannouchi, a appelé trois figures de l'opposition à Ben Ali à siéger au sein d'un cabinet d'Unité nationale, mais les postes de souveraineté - Intérieur, Défense, Affaires étrangères, Finances- sont restés entre les mains des membres de l'ancien régime. «Le RCD avait fusionné avec l'Etat, pour en tirer des profits. C'est le parti de la corruption, il ne peut pas être démocratique. Ce n'est pas un gouvernement provisoire, c'est le retour de l'ancien régime sous une autre forme», a dénoncé Mustapha Hammami, conseiller d'orientation, qui se définit comme syndicaliste et patriote. «Le peuple s'est soulevé contre une dictature, un système, pas seulement un homme. Tous les ministres de Ben Ali doivent partir. Leur confier des responsabilités, c'est un complot contre la révolution de Jasmin», a-t-il poursuivi, appelant à la dissolution du RCD. Cependant, il y a des Tunisiens qui relèvent que les ministres de Ben Ali reconduits dans le nouveau gouvernement ont une image d'hommes intègres et ne sont pas compromis dans la répression de la révolte populaire».