Le baromètre Harris Interactive publié dimanche et qui donnait pour la première fois la chef du Front national (FN) en tête au premier tour de la présidentielle de 2012, est confirmé hier par un nouveau sondage. La dirigeante de l'extrême droite française, Marine Le Pen, donnée en tête dans deux sondages face à tous les candidats crédibles, Nicolas Sarkozy en tête chamboule le jeu politique français à 14 mois de la présidentielle de 2012. Après le choc du premier baromètre Harris Interactive publié dimanche et qui donnait pour la première fois la chef du Front national (FN) en tête au premier tour de la présidentielle de 2012, un nouveau sondage publié hier dans le journal Le Parisien vient confirmer le coup de massue. Cette fois, Marine Le Pen est créditée de 24% (+1 par rapport au précédent), suivie du socialiste et actuel patron du FMI Dominique Strauss-Kahn (23%), puis du président sortant Nicolas Sarkozy (20%), qui serait donc éliminé dès le premier tour. Le premier sondage la donnait déjà en tête, face à Nicolas Sarkozy et à Martine Aubry, l'actuelle patronne du PS, au coude à coude avec 21%. Cette enquête a provoqué un coup de tonnerre dans la classe politique qui garde encore en mémoire l'exploit de son père Jean-Marie Le Pen qui, en 2002, s'était hissé au deuxième tour, après avoir éliminé le candidat socialiste Lionel Jospin. A droite, «c'est panique à bord», confie un élu du parti au pouvoir UMP. Lundi, le camp du président avait dénoncé la méthode et les choix de l'institut de sondage. Hier, des voix commençaient à s'élever pour appeler au rassemblement, voire même critiquer le choix de Sarkozy comme candidat. «Ce sondage me fait peur», a déclaré hier le député UMP Bernard Debré au micro de la radio France Info. «Nous sommes en train de chasser sur les terres du Front national, et ça profite au Front national», a-t-il dit, évoquant le nouveau débat lancé à droite sur la laïcité et la place de l'Islam dans la société, après un questionnement sur l'identité nationale qui avait donné lieu l'an dernier à des dérapages racistes. Alors que Nicolas Sarkozy ne peut se prévaloir que de 22% à 32% d'opinions favorables selon les baromètres, son plus bas niveau depuis son élection en 2007, certains commencent à s'interroger à droite sur sa capacité à fédérer son camp et à l'emporter. Le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan a demandé «solennellement à Nicolas Sarkozy de renoncer au plus tôt à sa candidature s'il souhaite éviter le suicide de la droite». Plusieurs élus UMP plaident pour un rapprochement avec le centre-droit et appellent surtout à «se ressaisir» et à «se démarquer» nettement du FN. De son côté, la gauche accuse Nicolas Sarkozy d'avoir favorisé une montée en puissance du FN en s'emparant de ses thèses fétiches pour des raisons purement électoralistes. «Mais qui nourrit le Front national? Ceux qui passent leur temps à parler de la peur de ceux qui sont différents», a déclaré Martine Aubry depuis son fief du nord de la France où elle bat campagne pour les élections cantonales prévues fin mars. Ce scrutin local sera un premier test pour la nouvelle égérie de l'extrême droite française. Ces sondages confirment la percée de Marine Le Pen, 42 ans, à peine deux mois après qu'elle a remplacé à la tête du FN son père, dont elle a hérité des talents d'orateur, tout en se gardant des dérapages verbaux dont le vieux leader d'extrême droite s'était rendu coutumier. Déjà en campagne, elle cale son discours sur celui des droites populistes européennes et annonce un prochain déplacement en Italie pour dénoncer le «niveau d'impuissance de l'Union européenne face aux flux migratoires» de clandestins en provenance de Tunisie et peut-être de Libye. Pour le politologue Stéphane Rozès, «ce sondage avec Marine Le Pen en tête est l'expression de l'incapacité de Nicolas Sarkozy à porter la fonction présidentielle et de celle du PS de définir une alternative crédible», alors qu'à 14 mois de la présidentielle, l'offre politique n'est toujours pas connue, ni l'UMP ni le PS n'ayant encore désigné ses candidats.