«Algérie, qui va te soigner?», lit-on sur une banderole brandie par les protestataires. La grogne continue dans le secteur de la santé. Les blouses blanches ne comptent pas baisser les bras avant d'arracher les droits de la corporation et durcissent le mouvement de protestation pour se faire entendre. Les médecins résidents ont organisé, ce jeudi 10 mars, à l'initiative du Collectif autonome des médecins résidents algériens, une grandiose marche, suivie d'un rassemblement, au niveau du Centre hospitalo-universitaire Mustapha-Pacha, à Alger. Selon les organisateurs, plus de 5000 personnes ont participé à cette action de protestation pour exprimer leur malaise et leur aspiration à améliorer leurs conditions de travail pour une meilleure prise en charge des malades. Les médecins résidents étaient appuyés par le syndicat des professeurs, les maîtres assistants, les externes, les internes et les médecins généralistes nouvellement diplômés. «On demande nos droits», scandent à gorge déployée les manifestants, interpellant les médecins qui suivent la marche à partir des trottoirs en criant: «Tout le monde est concerné, pas besoin de spectateurs.» D'autres protestataires ont brandi des badges et des pancartes sur lesquels on pouvait lire: «Médecins en colère», «Service civil: hogra». De loin, une banderole attire l'attention. «Algérie, qui va te soigner?» Une affiche qui en dit long sur la situation du secteur de la santé en Algérie qui est, selon plusieurs spécialistes, malade. Les médecins résidents, satisfaits et impressionnés par cette démonstration de force, promettent de revenir à la contestation, de maintenir la mobilisation et n'écartent pas d'appeler à un débrayage national pour les prochains jours (une réunion regroupant les délégués de plusieurs wilayas devait se tenir l'après- midi d'hier). «Aujourd'hui, nous avons prouvé que nous sommes une force incontournable et déterminés à aller jusqu'au bout de notre mouvement», a proclamé un membre du collectif lors d'un rassemblement improvisé à l'issue de la marche. «Cette marche a été une réussite totale», s'est félicité, hier, M.Mohamed Sahnoune, porte-parole du collectif, qui affirme que le mouvement est soutenu par la corporation. Joint hier au téléphone, notre interlocuteur a expliqué que le mouvement de protestation va gagner de l'ampleur pour faire valoir la plate-forme des revendications de la corporation. Il s'agit de l'abrogation des lois et décrets relatifs au service civil. «Le service civil obligatoire est une mesure illégale et anticonstitutionnelle et nous sommes les seuls à être soumis à cette obligation. C'est une injustice», a souligné M.Sahnoune. Ce dernier a estimé que cette mesure a démontré toute son inefficacité en matière de prise en charge des malades dans le sud du pays et dans les zones reculées. Il a plaidé pour l'ouverture de postes budgétaires dans ces zones dans le but d'améliorer la prise en charge des malades. Les médecins résidents demandent, en outre, l'élaboration d'un plan de carrière pour les médecins installés au Sud, à même de leur assurer le droit à un salaire digne. Le porte-parole du collectif a ajouté que ces derniers ne touchent aucune prime de contagion ou de risque. Le statut des médecins résidents pose, lui aussi, problème et les protestataires exigent sa révision. «Ce statut est flou, on est à la fois étudiants et praticiens. On demande sa révision ainsi que le droit d'avoir, entre autres, un syndicat et d'assurer un congé de maternité pour les résidentes», a expliqué notre interlocuteur. Autre revendication d'ordre pédagogique: les médecins résidents exigent le droit au stage dans le pays ou à l'étranger et ce dans le cadre de la loi. Le Service national n'est pas en reste des revendications des résidents. Ils veulent comme tous les Algériens avoir de la considération et être touchés par toutes les mesures y afférentes. «Notre premier souci n'est pas notre situation étroite. Il y a un fossé qui est creusé entre les citoyens et les médecins et ils doivent comprendre que, nous aussi, nous sommes des citoyens. Notre but n'est pas de partir, c'est de rester dans notre pays pour une bonne prise en charge des patients», conclut M.Sahnoune.