La Haute cour administrative égyptienne, qui a dissous le PND, a également ordonné la saisie de ses avoirs, répondant à l'une des principales revendications des manifestants qui ont provoqué la chute du régime en février. La dissolution du parti qui monopolisait le pouvoir sous le président Hosni Moubarak constitue une avancée «historique», mais beaucoup reste à faire pour ancrer un système pluraliste en Egypte, estimaient hier la presse et des militants pro-démocratie. «Le Parti national démocrate (PND) est déclaré nul et non avenu», claironnait le quotidien indépendant al-Chourouq, au lendemain de la décision de justice ordonnant la disparition de cette formation. «Le PND mis à mort», se félicitait al-Masri al-Yom, un autre titre indépendant. Les journaux gouvernementaux, longtemps alignés sur les positions du PND de M.Moubarak, saluaient une décision «historique». La Haute cour administrative égyptienne, qui a dissous le PND, a également ordonné la saisie de ses avoirs, répondant à l'une des principales revendications des manifestants qui ont provoqué la chute du régime en février. Selon son arrêt, la toute-puissante formation «a ruiné la vie politique» du pays en mettant en oeuvre «des politiques qui ont consolidé la dictature et la monopolisation du pouvoir», au travers notamment d'élections truquées et d'un Parlement aux ordres. Le PND, présidé par M.Moubarak, comptait parmi ses cadres dirigeants son fils et dauphin présumé Gamal, actuellement en détention préventive dans le cadre d'une enquête sur les violences commises durant la révolte, et pour corruption. L'ancien raïs est lui aussi en détention préventive pour les mêmes raisons dans un hôpital de Charm el-Cheikh, où il a été admis à la suite d'un problème cardiaque. La justice a ordonné son transfert dans un hôpital militaire, puis en prison, dès que sa santé le permettra. «La dissolution du PND constitue un nouveau succès majeur pour notre révolution», estime le groupe appelé «Nous sommes tous Khaled Saïd», un mouvement de jeunes pro-démocratie très actif sur Internet. «C'était une demande essentielle de la révolution. L'Egypte ne sera plus contrôlée par un seul parti», a déclaré Mohamed Cherdi, un porte-parole du Wafd, la principale formation de l'opposition laïque à M.Moubarak. Mais pour Rabab al-Mahdi, professeur de sciences politiques à l'université américaine du Caire (AUC), la dissolution «doit s'accompagner d'un interdiction pour les cadres du PND de se présenter aux élections pour un certain temps». «Il faut également développer la décentralisation et la participation» pour ancrer la démocratie au niveau local, souligne-t-elle, en notant qu'un vaste mouvement de gouverneurs de province ces derniers jours a été décidé, comme autrefois, par le pouvoir central. Pour Waël Khalil, un militant pro-démocratie et l'un des organisateurs des manifestations anti-Moubarak, la dissolution du PND «est la partie facile»: «Le vrai travail est devant nous: la forme de démocratie que nous voulons, les structures politiques que nous souhaitons bâtir. Ce sera plus compliqué». La chute de M.Moubarak et la réforme de la loi sur les partis ont conduit à l'éclosion de nombreuses formations, souvent de simples clubs, aux côtés des partis autorisés autrefois à former une opposition de façade. Aucune n'a toutefois encore réussi à s'imposer pour représenter la nébuleuse qui a renversé M.Moubarak, faite de jeunes internautes pro-démocratie, d'islamistes et de personnalités s'appuyant sur des structures faibles. Cette fragilité alimente des craintes de voir le puissant mouvement des Frères musulmans, qui pense d'ailleurs à se transformer en un parti, et les anciens du PND, peser de manière décisive lors des législatives de septembre et de la présidentielle prévue dans la foulée.