Et si Mohamed Boudiaf et Abane Ramdane étaient encore vivants, M. le Président? Confidences ou haine déterrée? A 94 ans, Ahmed Ben Bella tente de réécrire sa propre histoire. Dans un long article publié par la revue Jeune Afrique intitulé «Une soirée avec Ben Bella», le «premier président» de l'Algérie indépendante s'est hissé en héros en essayant de discréditer des figures emblématiques de la guerre de Libération nationale. Lors de cette rencontre avec le journaliste de Jeune Afrique, M.Ben Bella a lancé des tirs croisés contre son «ami du maquis», Hocine Aït Ahmed. Ce n'est pas tout. Même les grands hommes de la Révolution algérienne, dont l'âme est au Ciel, n'ont pas été épargnés par les flèches de l'ex-président algérien. Les défunts Mohamed Boudiaf et Abane Ramdane ont été «re-assassinés». En quelques mots, Ben Bella s'est présenté en véritable héros et incontestable artisan de la guerre de Libération. Le 1er Novembre? «C'est moi», répond-il. L'attaque de la poste d'Oran? «Jusqu'au moindre détail, c'était moi», se réjouit-il. Et Hocine Aït Ahmed? «Il était plus Kabyle qu'Algérien», accuse-t-il. Mohamed Boudiaf? Il était «zéro sur le plan militaire», qualifie-t-il. Abane Ramdane? Il l'avait empêché de participer au Congrès de la Soummam. Concernant M.Aït Ahmed et l'attaque de la poste d'Oran, outre les observateurs, le concerné lui-même avait détaillé cette attaque dans son ouvrage «Mémoire d'un combattant». Les historiens attestent à l'unanimité que le leader du Front des forces socialistes, alors chef de l'Organisation secrète (OS), était l'architecte de cette attaque. Ne s'arrêtant pas au seul fait de déterrer et vomir sa haine envers ces hommes au niveau national, M.Ben Bella se fait des ennemis même au niveau régional. Il prend à partie les Tunisiens, tout en faisant l'éloge du Maroc pays d'origine de ses parents. D'ailleurs, il le revendique haut et fort. «Il faut construire le Maghreb, clame-t-il. Les frontières doivent être ouvertes. Et c'est tout à fait possible. Comment pourrais-je penser autrement alors que même si je suis né en Algérie, même si j'y ai vécu, même si j'ai été le chef de la Révolution algérienne, ma mère et mon père étaient tous deux Marocains». Pour lui, les Marocains sont de «vrais combattants» et non «des poules mouillées». Allusion faite aux voisins tunisiens? De nombreux témoignages confirment qu'il porte peu d'estime aux Tunisiens et à la Tunisie, qui pourtant, a toujours soutenu l'Algérie dans les moments les plus difficiles, contrairement au Maroc qui a imposé un visa aux Algériens et ne rate aucune occasion d'accabler l'Algérie lorsque rien ne va plus. Les observateurs, de leur côté, ne se sont pas montrés surpris par de telles déclarations. Et si Boudiaf et Abane étaient encore vivants, M.Ben Bella? Aujourd'hui, ils ne peuvent pas répliquer aux accusations de l'ancien président algérien, mais l'Histoire n'oubliera pas les grandes contributions apportées par ces héros à l'Algérie...