«Il est suicidaire de ne compter que sur la rente pétrolière et gazière», a averti le président du Cnes. Alors que des acteurs économiques et des citoyens plaident pour l'accélération des projets d'investissements pour absorber la crise du chômage, le Conseil national économique et social (Cnes) plaide le contraire. Mohamed Seghir Babès, président de cette institution, plaide, en effet, pour le décalage dans le temps d'un certain nombre d'investissements. «Devant la masse des investissements qui portent sur les grosses infrastructures, qui relèvent d'un effort de rattrapage historique sur le désinvestissement qui a marqué le dernier quart de siècle, il faut décaler un certain nombre d'investissements. Il va falloir que des arbitrages interviennent», a-t-il préconisé, hier, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale. Selon l'analyse de M.Babès, il faut aller vers un autre régime de croissance. «Il ne s'agit pas d'arrêter les mégachantiers, il faut décaler dans le temps les investissements pour permettre d'absorber les effets inflationnistes potentiels qui sont contenus dans les augmentations des salaires», a-t-il estimé. La hausse de 25% des dépenses publiques prévue dans la loi de finances complémentaire 2011 pose, semble-t-il, un sérieux problème pour le Cnes qui appelle, d'ailleurs, à la prudence. «25% de hausse, cela signifie 23,5 milliards de dollars qui sont injectés en autorisations de programmes et en crédits de paiements. C'est lourd. Cela doit s'apprécier», a-t-il déclaré, suggérant au gouvernement de reconsidérer certains aspects. Pour le président du Cnes, les dernières revalorisations salariales accordées, entre autres, aux secteurs de la Fonction publique, de la justice et de la santé, relèvent du rattrapage. «Rattrapage sur une série de situations ici ou là. Evidemment, la propension naturelle, lorsqu'on est dans un contexte comme celui-ci, est d'aller vers la surenchère. Et les surenchères sont potentiellement porteuses de dérives», a-t-il noté. D'après lui, l'inflation est de nature rebondissante mais elle est dans des limites «contenables» et gérable jusqu'à 2014. «Il n'y a pas de spirale inflationniste infernale», a-t-il insisté. Pour l'invité de la Chaîne III, le problème réside dans la manière de passer de l'économie de la demande vers l'économie de l'offre, estimant prioritaire de travailler sur la diversification de l'économie et de poser les prérequis de l'après-pétrole. Et d'interpeller la société civile sur cette question. «Il faut, à un moment ou à un autre, assurer la transition d'un système vers un autre. Si l'on continue comme cela, on ne va pas aller très loin! Il est suicidaire de ne compter que sur la rente pétrolière et gazière», a-t-il averti. Babès a, en outre, profité de son passage à la Radio nationale pour revenir sur la tenue des états généraux de la société civile fixée du 14 au 16 juin 2011 à Alger pour préciser qu'il s'agit d'une initiative propre à son organisme. Il a relevé que la demande d'une consultation nationale sur le développement local a été faite par le Président Bouteflika à travers le Conseil des ministres. Selon lui, cela équivaut à une saisine du Cnes qui a vite réagi. «Le Conseil a la capacité d'autosaisine pour agir. Cette autosaisine a été rattrapée par les dernières décisions du conseil des ministres sur le développement local», a-t-il martelé.