L'Algérie sort aujourd'hui plus que jamais renforcée, en ce qui concerne le versement des rançons aux terroristes. Même mort, Ben Laden fait encore peur. Le terrorisme était au coeur des débats de la réunion semestrielle tenue le 16 mai par le Conseil de sécurité. Des exposés concernant la mise en oeuvre des sanctions contre Al Qaîda et les taliban, la lutte antiterroriste et la prévention de la prolifération des armes de destruction massive ont été entendus par les comités créés à cet effet par les résolutions 1267 (1999), 1373 (2001) et 1540 (2004). Pour l'Algérie, la menace terroriste qui pèse sur elle est actuellement localisée à ses frontières, notamment celle qu'elle partage avec la Jamahiriya libyenne. «Les événements de Libye accroissent le potentiel de violence dans la région: nous avons enregistré sur notre territoire un afflux d'armes lourdes volées dans les arsenaux libyens», a déclaré le chef de la diplomatie malienne dans un entretien publié le 3 mai par le quotidien Le Monde. Inutile de faire un dessin pour comprendre que le danger est bel et bien à nos portes. «Cette crise (libyenne Ndlr) a fait prendre conscience aux pays de la région de la nécessité d'une mobilisation plus forte et plus durable, afin d'assurer la sécurité et la présence de l'Etat auprès des populations visées par Aqmi», a ajouté Soumeylou Boubeye Maïga. La visite que doit effectuer, en Algérie, le président malien à partir du 20 mai, s'inscrit donc tout à fait naturellement dans la perspective de l'intensification de la lutte antiterroriste au Sahel. Une préoccupation qu'ont en commun les pays de la région. «La position de l'Algérie, comme la nôtre et celle des autres pays, est que la lutte contre le terrorisme doit reposer sur les efforts nationaux et régionaux...Toute présence extra-régionale pourrait alimenter la mobilisation de ceux qui souhaiteraient transformer notre région (le Sahel Ndlr) en zone de combat permanent», a souligné le ministre malien des Affaires étrangères sur les ondes de Radio France Internationale (voir L'Expression du 17 mai 2011). Il faut cependant rappeler qu'en matière de lutte antiterroriste, la coopération entre Alger et Bamako est passée par une période de froid qui a tourné en une minicrise diplomatique. En effet, suite à l'enlèvement de l'otage français Pierre Calmatte, un marché a été conclu entre Al Qaîda au Maghreb islamique et Bamako en vue de sa libération. Sous la forte pression exercée par Paris, les autorités maliennes avaient fini par libérer quatre islamistes parmi lesquels figuraient deux Algériens, dont l'Algérie demandait l'extradition. Une rançon qui faisait partie du «deal», aurait été versée par les autorités françaises aux ravisseurs en échange de leur ressortissant retenu en otage. La réaction du ministère algérien des Affaires étrangères a été instantanée: «La décision de Bamako de libérer des terroristes recherchés par des pays voisins est un développement dangereux pour la sécurité et la stabilité dans la région sahélo-sahélienne et sert, objectivement, les intérêts du groupe terroriste activant dans la région sous la bannière d'Al Qaîda», avait dénoncé, dans un communiqué le département de Mourad Medelci. Cela s'était soldé par un gel de cinq mois des relations diplomatiques entre les deux pays et un rappel de l'ambassadeur algérien à Bamako. Les conditions de la libération de Pierre Camatte ont été vécues du côté algérien comme un sévère coup de canif porté aux relations entre les deux pays, essentiellement en matière de lutte antiterroriste. L'Algérie sort aujourd'hui plus que jamais renforcée, en ce qui concerne le versement des rançons aux terroristes. «Les gouvernements européens doivent cesser tout paiement de rançons, sans quoi ils feront face à de nombreux autres enlèvements de leurs citoyens», a vivement recommandé Daniel Benjamin, le coordonnateur de la lutte antiterroriste au département d'Etat américain. Une voix qui résonne en écho du voeu d'Alger.