Le lâchage de Khadafi par la Russie s'est officiellement confirmé hier. Moscou s'est pour la première fois rallié à la position des occidentaux, en signant une déclaration du G8 appelant au départ de Mouammar Kadhafi. «Oui, nous sommes prêts à l'admettre... il doit partir», a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov. «Kadhafi et le gouvernement libyen ne sont pas parvenus à assumer leur responsabilité de protection du peuple libyen et ont perdu toute légitimité. Il n'a pas d'avenir dans une Libye libre et démocratique. Il doit partir», a dit très nettement la déclaration finale du G8. En ralliant le camp des occidentaux, Moscou a gagné un rôle de premier plan dans les efforts de résolution de la crise libyenne. Plusieurs responsables russes ont fait savoir que Barack Obama et Nicolas Sarkozy avaient approché le président russe Dmitri Medvedev pour qu'il tente une médiation dans le conflit. «Ils l'ont demandé. Aussi bien Obama que Sarkozy», a assuré devant la presse le haut représentant russe pour l'Afrique, Mikhaïl Margelov. Selon un diplomate européen s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, le revirement russe sur la Libye s'explique par des Russes «énervés» qui «ont l'impression d'être tenus à l'écart des questions internationales que ce soit sur la Libye ou le processus de paix au Proche-Orient pour lequel il n'y a pas eu de réunion du Quartette», a-t-il expliqué. Le président russe Dmitri Medvedev qui a confirmé hier avoir offert à ses partenaires du G8 sa médiation dans le conflit libyen, a annoncé l'envoi d'un émissaire à Benghazi. Le président américain Barack Obama a demandé à son homologue russe de faire comprendre à Mouammar Kadhafi qu'il doit quitter la Libye s'il veut survivre, a indiqué un haut responsable russe ayant participé aux pourparlers. Acculé au départ, frappé par des sanctions et affaibli par des défections, celui qui règne sur la Libye depuis près de 42 ans se montre pourtant inébranlable. Jeudi, le chef du gouvernement Baghdadi Al-Mahmoudi a réaffirmé que Mouammar Kadhafi ne quitterait pas le pouvoir. Il a par ailleurs déclaré que le régime libyen avait demandé à l'ONU et à l'Union africaine, qui s'est engagée dans une délicate médiation prévoyant un cessez-le-feu, de fixer une date et une heure précises pour un arrêt des combats. De son côté, l'UA a demandé la fin des bombardements de l'Otan, indispensable à ses yeux pour ouvrir la voix à une solution politique. Sur le terrain, les opérations militaires de l'OTAN entrent dans «une nouvelle phase», comme l'a déclaré le Premier ministre britannique qui a estimé que les opérations contre les forces de Kadhafi allaient être plus efficaces avec le déploiement des hélicoptères d'attaque Apache en Libye décidé par Londres et par Paris. L'OTAN pour sa part a accusé le régime libyen d'avoir miné les environs de Misrata, troisième ville du pays assiégée pendant deux mois par les forces gouvernementales. Le 12 mai, grâce aux frappes aériennes de l'Otan, les rebelles étaient parvenus à desserrer l'étau et à reprendre l'aéroport. Le commandant en chef de l'opération Protecteur unifié a affirmé que «le danger est évident (...) L'intention du régime est de reprendre la ville et d'infliger de nouvelles pertes» à ses habitants. Ahmed Omar Bani, porte-parole militaire de la rébellion à Benghazi, a affirmé que les forces de Kadhafi avaient posé les mines juste avant de partir «quand elles ont senti qu'elle perdaient». L'armée régulière continue de bombarder le côté ouest de la Libye chaque jour en tirant à l'aveuglette des roquettes qui «menacent la vie des civils», a accusé hier Human Rights Watch. Selon HRW, les Grad «tombent fréquemment sur les maisons, près des hôpitaux et des mosquées, forçant la population à fuir ou à vivre dans des caves». La ville de Zenten a été notamment la cible de «violents bombardements», a indiqué Ahmed Omar Bani, appelant l'Otan à frapper les forces de Kadhafi dans cette zone. H. Y./agences