«Vous êtes ma thérapie, pas la peine d'aller voir un psy», a déclaré l'artiste qui n'a pas remis les pieds sur la scène Ibn Zeydoun depuis 2001. «Fidèles, après 22 soirées de musique, chant, danse et performance théâtrale, nous arrivons ce soir à la clôture de la 12e eme édition du Festival culturel européen. Notre satisfaction était grande de voir l'enthousiasme de tous les artistes qui se sont succédé sur la scène de la salle Ibn Zeydoun, autantque celui des spectateurs», a déclaré en substance Son Excellence Laura Baeza chef de la délégation de l'Union européenne, en prélude à cette ultime soirée qui a clos en beauté ce mois culturel européen. Ainsi, c'est avec beaucoup de talent et d'émotion palpable que Samira Brahmia est revenue chanter dans cette même salle qui l'a vue se produire pour la première fois en 2001. C'est pourquoi, la chanteuse a tenu à saluer chaleureusement son public qui l'a toujours soutenue et encouragée, à tel point qu'elle a déclaré: «Vous êtes ma thérapie, pas la peine d'aller voir un psy»! Belle et rayonnante dans sa tenue noire, une belle chevelure rousse, Samira Brahmia et ses musiciens, notamment son fidèle compagnon de route, le guitariste Khliff Mizlallaoua et le percussionniste Amar Chaoui, ont fait monter la température dans la salle Ibn Zeydoun. Entre chanson entraînante et ballade romantique, elle bercera tantôt le public et tantôt le réveillera par des morceaux au tempo endiablé dont certains sont tirés du patrimoine ou du répertoire des autres artistes confirmés et amis. La chanteuse pop world, établie en France, est debout, au milieu de la scène sous une lumière feutrée. avec sa guitare c'est une première partie acoustique qu'elle offre à son public. Elle entame la soirée par une chanson de son album Naïlya, avec l'éternelle Azzi Essa'a de Slimane Azem, déjà reprise par la coqueluche du rock algérien, Cheikh Sidi Bémol. Samira a fait des efforts pour chanter en kabyle. Moment d'émotion. Quelques youyous fusent. Un ambiance conviviale se crée vite et s' impose durant toute la soirée. La Ilaha Ila Allah de Youcef Boukella n'a pas laissé le public indifférent de par les vocalises, atteignant les plus hautes des octaves, de la voix puissante de cette artiste spirituelle et cosmopolite qui prépare un deuxième album dont la sortie est prévue en avril 2012. Le public fait les choeurs en toute harmonie. One more night, est un slow sur lequel elle a greffé de la percussion bossa nova, lui insufflant ainsi un air bien festif. Oua ssala damii kassi est une belle reprise qui donnera la chair de poule à l'assistance, en faisait monter des larmes chez certains. Samira Brahmia, en symbiose avec le public comme avec ses musiciens, poursuit son périple musical en survolant des paysages mélodieux riches en sonorités. Sa célèbre Le fabuleux destin est un hymne pour l'égalité des sexes, rythmé par le tempo authentique du bendir. «Je dédie ce titre à toutes les femmes d'ici et d'ailleurs qui se battent et à tous les hommes qui les soutiennent, car c'est ensemble qu'on peut faire des choses», confie-t-elle. Samira interprète également Noujoum, qu'elle «chipe» une nouvelle fois au répertoire de Youcef Boukella. Une belle chanson sur «deux êtres séparés par la mer Méditerranée». Breakfast with a stranger adoucit l'atmosphère avant de la faire repartir de nouveau avec l'explosif Si H'med El Djadarmi, l'autre titre phare de son album qui prêche avec des métaphores l'attachement à l'identité et aux valeurs héritées des aînés. Ce titre fera vibrer la salle grâce au son du «guellal», une percussion traditionnelle typique à la région de l'ouest algérien. Le public ne se fait pas prier pour danser. Dans un autre registre, nimbée de mélodies celtiques est Feel the light. La chanson Dj'doudna (Nos ancêtres), une pensée aux premiers hommes et femmes de l'Afrique du Nord, cette région qui fut dans un passé lointain un carrefour des civilisations, était un autre moment fort de la soirée. D'ailleurs, Samira Brahmia a résumé son respect aux ancêtres en disant: «Nos ancêtres représentent notre histoire et notre richesse. Quand on ne sait pas d'où on vient, on ne saura pas où on va». Mountain of there rehaussé d'un son jazzy au piano est dédié à tous les «compatriotes qui souffrent à l'étranger». Du souffle africain au gnawi, il n'y a qu'un pas, franchi allègrement. Il suffit de dire le mot magique «gnawi» pour voir le public exulter. Autre moment fort de la soirée, c'est lorsque Samira fait monter sur scène ce jeune guitariste bien spécial. Son nom est Wassil, son propre fils! C'est drôle et très touchant. La soirée se termine en beauté avec l'arrivée de Laura Baeza qui offre à l'artiste un bouquet de fleurs. «Ce concert fut pour moi une thérapie. Le public algérien est magnifique. Je suis très heureuse de retrouver un public super joyeux et toujours énergique», a-t-elle déclaré dans les coulisses en fin de soirée. Interrogée sur le quotidien des artistes algériens émigrés, Samira Brahmia a estimé qu'elle ne se sentait pas du tout émigrée, car il y a une relation solide et permanente entre les artistes, d'autant plus que la question de l'émigration ne représentait pour elle qu'une «position géographique différente». Concernant son style de musique qui est empreint d'une multitude de sonorités, la chanteuse a fait comprendre que la musique véhicule un langage universel que toutes les cultures du monde peuvent comprendre. Et de conclure: «Ce n'est pas parce que nous avons vécu en Algérie que nous sommes forcés de chanter un style bien précis ou traditionnel».