Les islamistes radicaux retranchés dans la «Mosquée rouge» d´Islamabad ont résisté jusqu´au dernier d´entre eux à l´assaut donné la veille par l´armée pakistanaise. C´est là un autre épisode de la «guerre» qui oppose, depuis quelques années, certains pays aux phalanges extrémistes. Souvent, ce sont ceux-là mêmes, aujourd´hui à la tête de la lutte antiterroriste, qui ont contribué, de toutes les manières, non seulement à placer les islamistes à la pointe de l´actualité, mais aussi à les former et, dans certains cas, à les armer. Mais ce n´est pas là la première fois que l´élève retourne son arme contre son maître. Le cas de figure le plus récurrent est encore celui des moudjahidine afghans, formés, armés (l´arme américaine la plus sophistiquée, les Stringers, a ainsi été confiée aux moudjahidine afghans) et «sponsorisés» par la Centrale américaine de renseignement, avec les retombées qu´on connaît, lorsque ces élites «afghanes» essaimèrent ensuite à l´étranger devenant une menace permanente pour la paix et la sécurité des pays où le virus de l´islamisme a été inoculé. L´Algérie et les Algériens ont payé le prix fort, comme en témoigne encore l´attentat d´hier à Lakhdaria, le passage de ces hordes «afghanes» qui ont laissé derrière elles la mort et la désolation. Les Etats-Unis et le Pakistan, justement, ont une grande responsabilité dans cette dérive de l´islamisme. Oussama Ben Laden, agent notoire de la CIA, est une de ces créatures que l´agence américaine lança en Afghanistan dans les années 80 pour combattre les forces soviétiques. Ben Laden, «ennemi N°1» des Etats-Unis, continue cependant à servir ses anciens maîtres, ne serait-ce que par la justification, a posteriori, de la stratégie américaine de domination du monde au nom de la sécurité états-unienne. Et jusqu´à présent, Ben Laden a parfaitement joué son rôle, ce qui explique, peu ou prou, le fait que ce vrai «passe-muraille» recherché par toutes les polices du monde demeure pourtant introuvable. Autant les Etats-Unis ont puissamment contribué à la naissance d´Al Qaîda, et dans son sillage à la nébuleuse islamiste, autant les services de renseignements pakistanais ont été les maîtres d´oeuvre de la venue au monde des talibans, ces fameux «étudiants en théologie» qui bouleversèrent la donne stratégique dans l´Extrême-Orient musulman. A l´instar des Américains, les Pakistanais formèrent et armèrent les talibans qui semèrent la destruction en Afghanistan. Eliminés du pouvoir, leur nuisance demeure cependant presque intacte, comme en témoigne leur omniprésence aux frontières avec le Pakistan, où ont trouvé refuge d´importantes phalanges talibans. Et c´est Islamabad qui pourvoit les islamistes radicaux en cadres et en troupes, «prêts» à l´emploi et formés dans les milliers de «madrasas», véritables viviers de l´islamisme. Celles-ci sont, non seulement, tolérées, mais souvent protégées, car elles servaient les desseins d´Islamabad. La «Mosquée rouge» qui fait l´événement depuis dix jours en est un exemple édifiant. 5000 étudiants et 4000 étudiantes encadrés par des centaines de formateurs y étudiaient. Enorme complexe universitaire, la «Mosquée rouge» est à l´image des 13.000 «madrasas» que comptabilise le Pakistan. Et ce sont ces «étudiants» en théologie qui ont déstabilisé le pouvoir du général Musharraf. Washington comme Islamabad ont, durant de longues années, joué avec le feu et instrumentalisé les islamistes avant que ceux-ci ne se retournent contre leur géniteur. L´histoire de l´arroseur arrosé, mais eu égard aux dégâts directs et collatéraux occasionnés par la folie islamiste partout où elle s´est manifestée, il n´y a pas lieu d´en être fier.