Si l´Hexagone ne brûle pas encore, c´est tout comme, alors que l´usure du pouvoir (déjà?) semble avoir atteint de plein fouet le président Sarkozy, au moment où un vent de panique semble souffler sur l´Elysée. Deux ministres ont été ainsi poussés hier vers la porte de sortie (ils ont démissionné dimanche) pour, explique-t-on, protéger un ministre-clé du cabinet de Sarkozy, Eric Woerth, éclaboussé et rattrapé par l´affaire de la femme la plus riche de France, Liliane Bettencourt, héritière de l´Oréal. L´épouse de M.Woerth travaillait pour un bureau d´affaires chargé des intérêts de la milliardaire, au moment où celui-ci était ministre du Budget. Cela fit naître des suspicions quant à une éventuelle «facilitations» des choses, par M.Woerth, pour Mme Bettencourt. Mais il n´y avait pas que ça. L´affaire «France Télévisions» a aussi soulevé des tempêtes et rendu fou furieux le président français après les fuites sur son projet concernant le holding Télévisuel public qu´il voulait faire passer sous l´autorité de l´Elysée (présidence française). Nicolas Sarkozy a tout simplement court-circuité, par une loi, le CSA (Conseil de l´audiovisuel, autorité qui nomme le P-DG de France Télévisions) en lui enlevant l´essentiel de ses prérogatives et en prenant à son compte les désignations des responsables de la télévision d´Etat. De fait, l´Elysée a annoncé hier le choix de Rémy Pflimlin pour diriger France Télévisions, dégommant de la sorte l´ancien patron, Patrick de Carolis, du coup, pas en odeur de sainteté du côté des Champs-Elysées. En fait, les scandales se sont accumulés ces derniers mois dans la maison France où la situation devient de plus en plus préjudiciable mettant en exergue le dysfonctionnement d´une gouvernance française, le moins que l´on puisse dire, peu inspirée. De fait, sous la gouvernance Sarkozy, c´est la «République des copains et des coquins» - déjà dénoncée à l´époque, dans les années 80, par Michel Poniatowski - qui semble réapparaître alors que les conflits d´intérêts et les frasques de certains membres du gouvernement français (comme l´achat par un ministre, aux frais de la princesse, de cigares cubains à 12.000 euros) se sont multipliés, choquant de plus en plus l´opinion publique française en ces temps de crise économique et financière. Selon un sondage publié hier, 64% des Français estiment que les «dirigeants politiques sont plutôt corrompus». Aussi, la récurrence des scandales, où sont mêlés, directement ou par le biais de proches, des ministres ou proches du Président, minent le gouvernement et fragilisent le président Sarkozy à un an et demi d´une présidentielle (en 2012) qui s´annonce de plus en plus problématique. Dans cette atmosphère délétère de presque fin de règne, la gauche jubile et enfonce le clou ne se privant pas de revenir chaque jour sur les écarts de l´équipe Sarkozy. De fait, il est reproché au président français son comportement de monarque de l´Ancien Régime, plaçant à des postes stratégiques ses amis, comme il lui est reproché son goût du luxe et ses croisières en yacht somptueux. Dès lors, «l´affaire Woerth» - dont le premier résultat a été la démission-limogeage des secrétaires d´Etat à la Coopération, Alain Joyandet, et au Grand Paris, Christian Blanc - n´est en réalité que l´iceberg d´autres affaires plus ou moins graves et a émergé du fait du portefeuille détenu et de la personnalité du mis en cause, homme-clé du système Sarkozy. D´où son retentissement, qui a mis à nu une crise plus profonde qu´il n´y paraissait, laquelle, outre d´être embarrassante pour M.Sarkozy, met surtout en lumière des moeurs peu orthodoxes et peu en rapport avec les pratiques républicaines si chères au pays des Droits de l´homme et du citoyen.