Le 20 Août est une date-clé de la Révolution algérienne, un triptyque qui modula le combat révolutionnaire, induisant la stratégie politique du FLN et l´approfondissement de la lutte armée sur le terrain. Le 20 Août 1955, par l´offensive de l´ALN, a constitué le sursaut de la Révolution et la reprise en main des choses par l´insurrection du Nord-Constantinois. Le 20 Août 1956, c´est l´avènement du Congrès de la Soummam qui va donner une assise politique et doctrinale à la Révolution. Le 20 Août 1957 - date moins connue et singulièrement moins «médiatisée» - constitua en fait un tournant dans la conduite de la guerre d´indépendance, avec l´apparition au sein du Front des clans. Donc, cinquante-cinq ans après le 20 Août 1955 que savons-nous, que savent nos enfants, du «sursaut» salvateur de cette journée d´Août 55 qui remit la Révolution dans la bonne direction? Peu, très peu! Autant dire rien, tellement peu a été écrit et dit sur une période exceptionnelle qui, pourtant, a constitué le nouveau départ pour une Révolution nationale qui s´épuisait, mettant les combattants dans l´expectative. Or, Août 1955 a constitué la nouvelle donne dans la guerre de libération, le point de non-retour après les massacres de milliers d´Algériens à Skikda (ex-Philippeville) et sa région par les colons et l´armée française. C´était le clash entre les Algériens et la France, ouvrant la marche irréversible vers l´indépendance. De fait, la Révolution nationale après l´offensive du Nord-Constantinois, prenait un nouveau départ. En réalité - les historiens algériens ne le soulignent pas suffisamment et/ou n´en font pas le lien-, la réunion d´Ifri dans la vallée de la Soummam n´aurait jamais pu être organisée sans l´offensive de l´ALN du 20 Août 1955 qui a redonné un second souffle à la Révolution. En effet, le Congrès de la Soummam ne peut se comprendre sans le rattacher aux mutations induites dans le courant insurrectionnel par l´apparition de nouveaux chefs qui orientèrent le Congrès et donnèrent à la Révolution nationale ses assises au plan juridique, politique et militaire. Ce sont ces points d´ombre qui restent à éclaircir pour comprendre, outre cette période charnière de la guerre de Libération nationale, mais aussi, singulièrement, les dérives et ruptures observées au lendemain même de l´indépendance du pays, dont les «évènements» de l´été 1962 en restent l´exemple marquant. Au moment où l´Algérie célèbre le (s) 20 Août, il faut se dire que tout n´a pas été dit sur une Révolution dont l´épopée est encore à écrire. Quarante-huit ans après l´indépendance, la mémoire collective nationale reste orpheline des faits glorieux du combat de nos aînés pour l´Indépendance. Et pourtant, il y a tellement à dire et à écrire sur des faits toujours ignorés par les Algériens, car peu médiatisés, sinon jamais évoqués, comme la réunion du Caire du 20 Août 1957, lors de laquelle il y eut une certaine remise en cause des options du Congrès de la vallée de la Soummam et l´apparition du jeu d´appareils et le clanisme dont les effets se sont manifestés lors du Congrès de Tripoli de juin 1962. Effectivement, nombreux sont les Algériens issus de la génération de l´Indépendance qui ne savent rien sur leur pays, sur son Histoire, sur le Mouvement national et ses faits d´armes. Sur tous ces faits, motus, l´Histoire (officielle) est restée silencieuse, qui n´a pas cru devoir prendre en charge ces aspects fondamentaux de l´identité nationale et repères de son historicité. Les manuels scolaires orientés n´ont pas permis à la jeunesse algérienne de connaître ses héros, ceux qui ont conduit la Révolution. Ce sont ces points d´Histoire de la Révolution - occultés, ou pleins de non-dits - qui font défaut pour comprendre l´Algérie d´aujourd´hui et les ruptures qui l´ont marquée au long des quarante-huit dernières années.