Le monde a frôlé un deuxième 11 septembre. L'avion israélien, qui a été la cible d'un tir de missiles, transportait 270 passagers. Israël a connu son jeudi noir. Le jour même des primaires au sein du Likoud, parti au pouvoir, en vue des prochaines élections, un hôtel israélien situé à Mombassa au Kenya a été la cible d'une voiture piégée suivie, quelques instants après, de deux tirs de missiles sur un avion israélien qui décollait de la même ville. Les condamnations de la communauté internationale ont été rapides et unanimes même si Israël ne fait état que de trois morts israéliens dont deux enfants parmi les quinze victimes. Mais au départ il y a lieu de situer la partie qui serait derrière le double attentat de Mombassa. Quelques heures après le double attentat, les commentateurs ont mis l'accent sur le réseau Al-Qaîda qui aurait mis ses menaces à exécution. Les Américains ont évité de privilégier cette piste. Ils ne voulaient pas donner au réseau de Ben Laden une dimension démesurée qui risquait d'avoir des incidences sur le plan diplomatique. Ce n'est que tard dans l'après-midi qu'une nouvelle organisation, inconnue des experts en terrorisme, dénommée «L'armée de Palestine», revendiqua les attentats du Kenya. La localisation de la partie qui a ciblé Israël importe peu. Le double attentat de Mombassa est le second acte après les événements du 11 septembre qui ont fait vibrer le monde. L'attentat de Bali passe au second plan parce que Bali se trouve en Indonésie. La position d'Israël dans les conflits qui secouent la planète n'est pas clairement identifiée. Toutes les analyses s'accordent à faire admettre l'idée d'un petit pays neutre qui est agressé de toutes parts par un Orient hostile à l'Amérique et dont ce petit pays représente un échantillon isolé et très vulnérable. On lit cependant très peu sur sa force nucléaire qui représente un véritable danger sur la région. Il est plus aisé de désarmer un Irak qui veut étendre ses tentacules sur le Golfe et d'éliminer son rais dictateur. Sinon comment interpréter la première déclaration d'un responsable israélien qui disait quelques moments après le double attentat que c'est «la démocratie» qui est visée. Mais a-t-on jamais visé la démocratie de l'extérieur? Le raisonnement ambiant conduit donc à une lecture linéaire qui situe Israël dans son environnement «hostile». Il dévoile aussi l'extension d'Israël sur la Corne de l'Afrique de l'Est. Sur le plan interne, un autre attentat a eu lieu à Beit Shean, dans un bureau de vote, selon les informations divulguées par des sources israéliennes, et qui a laissé six morts au moment où se déroulaient les primaires du Likoud que se disputaient Sharon et Netanyahou. Dès l'annonce de l'attentat, Sharon a parlé de «vengeance», pendant que son ministre de Affaires étrangères et concurrent a voulu mettre l'accent sur le rapatriement des victimes. Mais la question qui reste en suspens est: pourquoi le Kenya? C'est de ce pays, qu'a eu lieu plus précisément, l'attentat, attribué à Al-Qaîda, de l'ambassade américaine à Nairobi en 1998, qu'est parti le signal des grands opérateurs terroristes. Bien implanté dans cette région de l'Afrique, Israël a pu constituer un réseau de renseignement et ouvrir un bureau du Mossad. C'est là que convergent toutes les informations recueillies ici et là des différentes places du monde. C'est là aussi qu'on retrouve la plus grande base de stationnement des troupes américaines en Afrique. Elle se situe à Mombassa. Sur ce plan, le double attentat de jeudi est un coup dur pour le Mossad et la CIA. Il s'agit là d'un coup de maître qui n'exclut pas la possibilité de coups tordus du Mossad même. Parce que les primaires ont eu lieu jeudi entre un militaire et un civil qui revient en force dans les sondages. Le militaire Sharon a vite haussé le ton en réclamant «vengeance» au moment où le taux de participation est coincé au-dessous de la barre des 25%. Le triple attentat a créé le déclic et permis à Sharon de remporter les élections au sein du Likoud. Ces attentats profitent en premier lieu à Sharon qui réussit à promouvoir sa politique et à faire débloquer l'aide américaine de 14 milliards de dollars. Somme qui devait compenser le déficit causé par l'Intifada. Il profite à Bush qui fait rappeler à l'occasion ses «bonnes» thèses de lutte antiterroriste au moment où les Européens le coincent à l'ONU quand il veut faire passer sa résolution sur l'Irak.