Citadelle infranchissable, l'Europe, devenue aujourd'hui la destination des harragas, adopte le modèle américain en matière d'immigration en décidant d'instituer la “Carte bleue”, qui sera le moyen de vider davantage le tiers-monde de sa matière grise et de sa main-d'œuvre qualifiée. Les Algériens, qui sont attirés par toutes les formules d'immigration, Green Card américaine, Canada entre autres, ont là une nouvelle opportunité de postuler. Elle ne concerne cependant que les travailleurs diplômés et hautement qualifiés. Estimés à sept millions environ par Djamel Ould-Abbès, le ministre de la Solidarité, de la Famille et de la Communauté nationale à l'étranger, l'immigration algérienne risque d'augmenter encore. Mais, cette fois-ci l'Europe veut uniquement la “crème” de la main-d'œuvre algérienne. Avec l'intention d'attirer les diplômés étrangers et répondre aux besoins de main-d'œuvre qualifiée, l'Union européenne met les bouchées double pour finaliser d'ici la fin de l'année en cours le projet de “Carte bleue”, malgré l'opposition de la République tchèque, qui conteste le fait que ses ressortissants n'ont pas encore libre accès au marché du travail européen. En tout état de cause, l'Union européenne usera de cette nouvelle trouvaille d'immigration sélective, pour prendre aux pays du tiers-monde ce qui leur reste de travailleurs diplômés et qualifiés. Ceci étant, la “Carte bleue” est la nouvelle formule trouvée par les Etats membres de l'Union européenne pour combler son déficit en travailleurs diplômés et qualifiés. Elle s'adresse à des diplômés étrangers et leur ouvre la porte à des emplois hautement qualifiés au sein des pays de l'UE. Pour attirer cette main-d'œuvre spécialisée, les Européens proposent que ces emplois aient le niveau de rémunération élevé. Ainsi, il est question que le salaire offert à ceux qui seront retenus soit 1,5 fois supérieur au niveau moyen des salaires dans l'Etat membre. À signaler que plusieurs pays ont toutefois demandé à réduire ce niveau à 1,2 fois. Autre avantage, cette Carte bleue permettra à son titulaire et aux membres de sa famille d'entrer, de séjourner et d'accéder au marché du travail dans l'Etat membre demandeur pour un secteur concerné. Mais elle ne sera pas une autorisation permanente, ni un titre de travail valable pour l'ensemble de l'UE. Elle vise à réguler l'immigration à des fins professionnelles et à répondre à ses besoins de main-d'œuvre qualifiée. Cette carte vient compléter le dispositif mis en place avec le Pacte pour l'immigration et l'asile, définitivement approuvé jeudi par les 27 et qui sera officiellement entériné par leurs dirigeants à leur sommet du 15 octobre à Bruxelles. Même si Brice Hortefeux, le ministre français de l'Immigration et de l'Identité nationale, a affirmé que : “La Carte bleue n'est pas la Green card,” il n'en demeure pas moins qu'elle sera sa rivale. À l'issue d'une réunion, qui a regroupé jeudi à Bruxelles les ministres chargés des questions d'immigration, la France, qui préside l'Union européenne, a indiqué jeudi qu'il existait un “soutien de l'ensemble des délégations à une proposition de directive (loi) concernant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié”. Néanmoins, la République tchèque émet une réserve, car ses ressortissants, comme ceux des autres pays de l'Est qui viennent d'adhérer à l'UE, n'ont pas encore libre accès au marché du travail de tous leurs partenaires. Prague ne veut pas que la “Carte bleue” entre en vigueur avant 2010, date à laquelle doivent être levées ces dernières entraves. Selon le commissaire européen à la justice Jacques Barrot : “Les Tchèques veulent consulter leur Parlement avant de donner leur accord.” Il y a lieu de noter que l'Allemagne a toutefois modulé la portée de la “Carte bleue”, car souhaitant garder le contrôle de son immigration choisie. Pour le ministre allemand de l'Intérieur, Wolfgang Schäuble : “La Carte bleue ne règle pas l'accès aux marchés du travail nationaux.” En dépit de cette opposition, les ambassadeurs des Etats membres à Bruxelles ont été chargés de finaliser le texte. Paris, qui pilote le projet, veut un accord fin 2008, date à laquelle son semestre de présidence des conseils de l'UE prendra fin. Pour atténuer les critiques émanant de pays du tiers-monde, qui voient dans la future carte européenne un pillage des cerveaux, le ministre français Brice Hortefeux en affirmant : “Le système n'est certainement pas le pillage des cerveaux.” Son homologue espagnol Celestino Corbacho a apporté de l'eau à son moulin en rappelant qu'une disposition du projet par laquelle les Etats membres s'engagent à s'abstenir de recruter dans les secteurs des pays en voie de développement où cela pourrait poser problème. Merzak T.