Les palais de la casbah sont plus que jamais menacés. Il y a quelques jours, l'Algérie célébrait le mois du patrimoine (18 avril-18 mai). Plusieurs manifestations culturelles et artistiques ont été organisées çà et là sans que des décisions concrètes soient prises afin de sauvegarder le patrimoine historique national. Voué qu'il est à la déperdition et la mégarde. Les uns après les autres des pans entiers de notre mémoire collective s'effacent… Fragilisés par le temps et la négligence, nos sites historiques et architecturaux viennent de subir, à l'image de toutes les constructions des régions d'Alger et de Boumerdès, des dommages dus au tremblement de terre de mercredi dernier. Dans une déclaration à l'APS, M. Abdelkader Guessab, directeur général de l'Agence d'archéologie et des monuments, indique que certains monuments historiques et architecturaux ont subi à leur tour quelques dommages. “Je dirais que les monuments ont relativement bien tenu d'une manière générale eu égard à l'âge de ceux-ci qui datent de plusieurs siècles et à l'intensité du séisme et à ses différentes répliques”, a-t-expliqué, soulignant qu'“il n'y a pas eu d'effondrement d'édifices”. Outres les désormais fantomatiques maisons de la casbah, qui ne reflètent aujourd'hui que la désolation et le désarroi de leurs habitants, qui se retrouvent menacés dans leur vie à chaque fois que la terre bouge, les palais de la casbah sont plus que jamais menacés par ce phénomène naturel. Ces sites classés monument universel par l'Unesco ont été dramatiquement affectés par le séisme. Une partie des remparts de la citadelle d'Alger, un bijou architectural surplombant les hauteurs de la vieille cité, communément connue sous le nom de Dar Essoltane, ont été sérieusement endommagées. Ces derniers “risquent de s'effondrer”, précise M. Guessab. Un petit minaret de la mosquée du Dey a été “cisaillé” et d'anciennes fissures se sont élargies des suites des secousses, a-t-il ajouté. Le fort de Tamenfoust, situe a El-Marsa, a, quant a lui, vu lui l'effondrement de ses remparts tandis que le mausolée de Taksept, datant de l'époque numide, “a été sérieusement touché” et il y eut une chute de colonnes au niveau du site archéologique de Tigzirt, a confié M. Guessab. D'autre part, si on se réjouissait de voir que la Villa Abdelatif se vidait de ses “illégitimes” occupants pour être restituée aux artistes, on l'est moins aujourd'hui en apprenant que les travaux de restauration entamés par les services de la wilaya d'Alger ont été vains. Car les piliers édifiés au sein de l'enceinte se sont littéralement effondrés. Ces dégâts enregistrés un peu partout dans les zones touchées par le séisme témoignent du laxismes et de la négligence que subissent nos sites historiques et architecturaux, car, à plusieurs reprises des voix se sont élevées afin d'attirer l'attention des responsables quant à l'urgence de prendre des mesures pour préserver notre patrimoine matériel. Et dire que pour parler du patrimoine, il faut avant tout parler d'histoire et de mémoire commune. Il faut donc se dire que notre mémoire est transformée, blasée, estropiée, elle vient même d'être effacée. Si le tremblement de terre est un phénomène naturel, qui permet à la terre de respirer, l'état actuel dans le quel se trouve notre patrimoine n'a rien de naturel. Le dernier séisme n'est à l'origine des fissures, elles existaient déjà. Les effondrements enregistrés sur les différents sites sont surtout le résultat de l'inadvertance et de la mauvaise prise en charge du patrimoine. Une preuve tangible de l'absence d'une politique cohérente susceptible de faire de notre histoire une leçon du passé et de notre patrimoine architectural un modèle de construction en ce moment où les immeubles s'effondrent comme des châteaux de cartes. Même les pillards de Bagdad connaissaient la valeur de leur patrimoine, alors il est temps de tirer des leçons. W. L.