Dans la France où se bousculent entre 200 000 à 400 000 clandestins, le trafic de papiers est un marché lucratif. En plus de la liberté de circulation qu'offre la régularisation, c'est aussi l'assurance d'accéder au bénéfice du travail et de nombreuses prestations sociales. Face à la détresse des “sans-papiers”, les filières de trafic s'activent et les montants pour chaque dossier s'élèvent à plusieurs milliers d'euros. Dans la faune des prédateurs, certains peuvent parfois obtenir de vrais documents. C'est rare ! En réalité, les candidats sont souvent la proie de faussaires qui ont parfois la dextérité de produire de faux papiers impossibles à déceler. En tout cas, aucunement suspects pour éveiller les doutes d'employeurs, médecins ou policiers qui les demanderaient. C'est le cas de cet Algérien qui a été arrêté mardi dernier en flagrant délit à Paris, a-t-on appris mercredi de sources proches, en possession de 9 titres de séjour contrefaits. Cet homme de 36 ans a la réputation de fournir un “travail de qualité” grâce à un matériel informatique de pointe. Il alimentait en faux papiers le nord de Paris et la Seine-Saint-Denis, département à forte concentration d'émigrés de tous les horizons. Il a été interpellé par des policiers de l'Office central de lutte contre le crime organisé avec deux clients, un Algérien de 48 ans et un Tunisien de 41 ans. Les trois ont été déférés jeudi devant le parquet de Bobigny qui a ouvert une information judiciaire pour “aide à l'entrée et au séjour en bande organisée”, "association de malfaiteurs”, “faux et usage de faux administratifs” et “fourniture de faux”. La détention de moyens de falsification de cartes bancaires et de faux documents privés est également reprochée au principal suspect, déjà condamné pour “faux”. Il est soupçonné d'avoir réalisé des cartes nationales d'identité (CNI), des permis de conduire, des cartes de résident, des titres de séjour, mais aussi des attestations de cartes vitales d'assurance maladie. Les enquêteurs qualifient son travail d'artisanat de luxe, notamment en matière de faux passeports. Dans deux appartements perquisitionnés dans le XVe et le Xe arrondissements, les enquêteurs ont notamment découvert un important matériel informatique d'impression, de plastification haut de gamme permettant de fabriquer toute une variété de documents. Les policiers étaient en réalité sur une piste depuis le mois de juillet. Ils sont intervenus mardi en milieu d'après-midi, alors que le faussaire présumé était en pleine transaction avec un de ses clients. Les policiers ont aussi mis la main sur des ordonnances vierges de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et des factures vierges à en-tête de divers organismes pouvant être utilisées comme justificatifs de domicile. Une sorte de liste de commandes de gens à alimenter en faux divers a également été découverte dans une des deux officines, tandis qu'un des ordinateurs contenait des photos des sigles sécurisés qu'on trouve sur les CNI et qu'il reproduisait. En outre, le faussaire possédait un lecteur de cartes bancaires, des cartes à puce dites “yes cards” susceptibles d'être utilisées après avoir été recodées. L'examen des disques durs et des équipements vont peut-être révéler la quantité de documents réalisés. A. OUALI