Alors que le wali de Boumerdès a annoncé publiquement, en début de juillet 2008, que les chalets seront démantelés et qu'ils ne seront plus attribués, voilà qu'un élu de l'APC en collaboration avec certains membres d'associations défie le chef de l'exécutif et distribue, en l'espace de dix jours, plus de 45 chalets sous le couvert d'une prétendue décision de régularisation. Le comble c'est que ce membre de l'APC n'est qu'un délégué communal n'ayant aucun pouvoir légal pour signer des documents administratifs d'une telle importance. Il a tout simplement usé d'un arrêté de délégation de signature non approuvé par la tutelle qui lui a été établi par le maire le 16 septembre 2008, sans l'accord de l'exécutif et sans l'approbation de la chef de daïra. Cette dernière avait non seulement rejeté cet arrêté mais l'a qualifié “d'illégal et non conforme aux textes en vigueur”. Elle avertira le maire dans une autre lettre datée du 27 septembre 2008 de “l'illégalité des documents de régularisation signés par certains élus”, faisant allusion “aux décisions d'annulation de chalets” et “des décisions de régularisation” signées par le même délégué. Ces régularisations sont en réalité des nouvelles attributions puisque les chalets changent carrément de propriétaires et ont ciblé surtout les oranges 4 qui sont déjà suivis par la justice pour quitter leurs chalets. Parmi les nouveaux bénéficiaires, figurent des “squatters” de chalets et des membres de familles de certains membres d'associations qui ne disposent même pas d'agrément, mais qui font la pluie et le beau temps au niveau de l'APC de Boumerdès. Parmi les victimes de cette “opération commando”, deux maîtres assistants d'université verront leurs chalets squattés la nuit de l'Aïd et les nouveaux propriétaires régularisés. Ni mise en demeure, ni préavis, ni huissier de justice. “C'est l'APC de nuit qui est passée par là”, ironise une de leurs voisines. Sous la pression du chef de daïra et des membres de l'exécutif, le P/APC décide d'annuler, le 7 octobre dernier, l'arrêté de délégation de signature qu'il avait établi au délégué communal. Il fait même accompagner sa décision d'annulation par une lettre à travers laquelle il se désengage de toutes les décisions signées par ce délégué. “Je vous informe que ces décisions sont nulles et non avenues”, précise le maire dans sa missive adressée à la chef de daïra, au wali et au procureur de la République. Mais trop tard, plus de 45 chalets seront “régularisés”, c'est-à-dire attribués, grâce à des attestations qui, selon des membres de l'APC, ne sont même pas enregistrées au niveau du secrétariat de l'APC. Les imprimés utilisés pour cette entreprise furent même “importés” d'une commune voisine, précise un vice-président. “Ceci confirme le caractère clandestin de cette démarche qui n'a reçu ni l'aval des deux autres élus qui composent la commission concernée ni celle de l'exécutif de l'APC”, affirme M. Djenadi, membre de l'exécutif et président de la commission sociale. Ce dernier ainsi qu'un autre élu, membres de la commission présidée par le délégué communal, responsables des décisions controversées, sont allés jusqu'à solliciter le 8 octobre 2008, par écrit, la justice pour l'ouverture d'une enquête sur l'anarchie qui règne dans la gestion des chalets. Le président de l'APC demande de son côté à l'instance judiciaire d'annuler toutes les décisions de “régularisation des chalets” signées par son délégué communal. Ce dernier rencontré dans son bureau au siège de l'APC nous a affirmé qu'il n'a fait qu'entériner des situations déjà traitées par l'APC et qui ont reçu l'approbation du maire et de la commission. “Nous avons régularisé des gens qui se trouvaient déjà dans les chalets”, dit-il tout en nous promettant de nous faire parvenir le jour même les PV de cette commission. Mais à ce jour, nous n'avons pas encore reçu ces documents. Durant notre enquête, nous avons assisté en direct et en compagnie du maire et de deux de ses adjoints à une affaire de trafic de chalets. C'est une personne native d'une wilaya de l'est du pays venue légaliser une décision d'attribution de chalets portant un faux cachet de l'APC, une fausse griffe et une signature scannée. Par ailleurs, des documents en notre possession parlent de plus de 571 chalets inoccupés sur les 2 361 répartis sur les 13 sites de la commune de Boumerdès. Des dizaines sont louées et d'autres ont été cédées. Mais nombreux occupants ne disposent d'aucun document. Bref, c'est l'anarchie totale. On se rappelle que des terroristes avaient déjà utilisé ces chalets et y ont même entreposé des bombes. Mais certains élus n'ont pas caché leur amertume face à l'anarchie qui règne au niveau de leur APC. “Comment voulez-vous régler des problèmes avec un exécutif qui ne s'est jamais réuni officiellement avec un ordre du jour précis”, lâche un vice-président. M. T.