Dans le cadre de son programme “Carte Blanche sur les théâtres régionaux”, le Théâtre national algérien Mahieddine- Bachtarzi a reçu pour une semaine, le Théâtre régional de Annaba. Ce dernier a proposé un spectacle pour enfants et un autre pour adultes, la pièce Mabni Lil Madjhoul (vers l'inconnu) en l'occurrence. D'après le texte et la mise en scène de Djamel Hamouda, Mabni Lil Madjhoul, qui emprunte au grotesque et à l'absurde ses formes, traite du phénomène d'acculturation dans un contexte de mondialisation où l'échelle des valeurs est renversée, et où l'homme du Sud n'a plus de repères. À la principauté de la pomme de terre, rien ne va plus. Le prince Saâdi (interprété par Abdelhak Benarouf), voit un beau jour son peuple fuir la principauté pour un ailleurs moins compliqué et plus libre. Saâdi ne sait comment gérer cette catastrophe, malgré le soutien moral de sa femme Messaouda. Mais les ennuis du prince, hanté par le spectre de son père, s'intensifient : la principauté de la pomme de terre est encerclée par l'ennemi… les Etats-Unis, représentés par un cow-boy. L'ennemi en question ne colonise pas géographiquement le royaume de la pomme de terre ; il le fait culturellement et de manière mesquine. Le chef d'Etat mangeur, Messaoud, ne parvient à élaborer aucune offensive et se résigne. Au milieu de tout ce tumulte, apparaît le personnage d'Allaoua (interprété par Kamel Rouini) : un contrebandier alcoolique mais extralucide car critique avec virulence le prince pour son oppression, et le peuple pour sa soumission. Par ailleurs, le jeu des comédiens sur le burlesque a été fort intéressant, mais la constance n'a pas été au rendez-vous des 90 minutes de spectacle, en raison des problèmes de respiration et de souffle. Mabni Lil Madjhoul aborde plusieurs thèmes sérieux avec beaucoup trop de dérision et d'humour, allant jusqu'à installer un tank sur scène, poussant ainsi le ridicule à son paroxysme. Aussi, la pièce, qui traite plusieurs thèmes à la fois (notamment l'acculturation, l'assimilation et la mondialisation), n'a fait que survoler les thématiques. Ne noircissons pas davantage le tableau, le public a bien reçu la pièce ponctuant ainsi le jeu des comédiens par des applaudissements. S. K.