Alors que les divergences, notamment sur la question du droit au retour des réfugiés palestiniens et celle du démantèlement des colonies israéliennes, sont loin d'être réglées, Bush compte faire de ce rendez-vous un succès historique. Un pari risqué, estiment les analystes du conflit israélo-palestinien. Le véritable lancement de la “feuille de route” du quartette se fera aujourd'hui à Aqaba, si George Bush parvient à convaincre Sharon et Abou Mazen d'entamer la mise en œuvre de cet énième plan de paix. Il a mis en branle sa campagne moyen-orientale, hier, à Charm El-Cheikh, lors du sommet qui l'a réuni avec Hosni Moubarak, Abdallah II de Jordanie, le prince héritier saoudien Abdallah, l'émir de Bahreïn et le Premier ministre palestinien. La veille, son chef de la diplomatie, Colin Powell, avait arraché à ses pairs arabes un soutien à la “feuille de route” sans toutefois briser leur résistance à une normalisation avec l'Etat hébreu. Le secrétaire d'Etat américain n'a obtenu qu'“un accord pour l'assainissement de l'atmosphère entre Israël et les pays arabes” à condition que Tel-Aviv reconnaisse “clairement un Etat palestinien”. Les propos de Powell, après sa réunion avec les ministres arabes, montrent que l'avancée dans la voie de la paix est peu significative : “Les paroles viennent toujours avant les actes, mais nous attendons des actes. Ce n'est pas assez d'avoir des déclarations et des paroles sans actes.” Il n'a pas manqué de souligner que la “feuille de route” nécessite des actions, non des paroles. Le président américain tentera d'être plus convaincant en proposant en échange de plus d'engagement arabe davantage de dollars. Il mettra la pression sur ses interlocuteurs au cours de ces deux sommets pour obtenir le maximum de concessions et réussir dans son entreprise d'établir la paix dans une région instable depuis plus d'un demi-siècle. Les Palestiniens et les Israéliens, principaux concernés par l'opération, s'attellent à préparer le rendez-vous d'aujourd'hui. Ariel Sharon a réuni, hier, les ministres qui l'accompagneront à Aqaba pour mettre les choses au point. La délégation comprendra les ministres des affaires étrangères, Silvan Shalom, de la défense, Shaul Mofaz, du commerce et de l'industrie, Ehud Olmert, et de la justice, Yossef Tommy Lapid. Côté palestinien, Abou Mazen, que les Américains veulent substituer à Yasser Arafat, travaille, selon Nabil Chaath, en étroite collaboration avec le président de l'Autorité palestinienne. Le ministre palestinien des affaires étrangères a précisé que “pas une réunion ne tient sans que nous expliquions clairement que notre président Arafat doit être libre de ses mouvements”. Voila une manière de dire que même si Mahmoud Abbas est sous les feux de la rampe, Yasser Arafat est toujours aux commandes et que rien ne se fait sans son consentement. Cela suppose que la marge de manœuvre du chef du gouvernement palestinien est limitée. Par ailleurs, les dirigeants arabes considèrent toujours Arafat comme le représentant élu du peuple palestinien et n'ont aucune intention de cautionner sa mise à l'écart souhaitée par Washington et Tel-Aviv. Le succès du sommet de Aqaba est tributaire de la pression de Bush sur les deux antagonistes pour l'obtention d'un accord sur les questions du droit au retour des réfugiés palestiniens et le démantèlement des colonies surtout. Un désaccord sera synonyme d'échec, ce que Bush refuse d'envisager. K. A.