Hormis le RCD, tout le reste des formations politiques va adopter aujourd'hui le projet de texte présidentiel. Lorsqu'en 2002, le président Bouteflika, acculé par les évènements de Kabylie, convoquait le Parlement pour procéder à l'institutionnalisation de tamazight, nul ne se faisait d'illusions, en dépit de quelques grognements parfois virulents auparavant à l'hémicycle, de l'issue du scrutin. Six ans plus tard, l'histoire semble se répéter. C'est qu'il y a de ces raisons que la raison ignore. Aujourd'hui donc, le Parlement dans ses deux Chambres est convoqué au Palais des nations, au Club-des-Pins, pour la présentation et au vote des amendements apportés à la loi fondamentale. Et d'ores et déjà, sans risque de se tromper, on est sûr de la tournure des évènements. Le résultat, pour ainsi dire, pour emprunter au jargon sportif, est déjà connu. Hormis le RCD, dont on sait qu'il votera contre, le reste des formations politiques apportera son onction au projet présidentiel. Hier à l'hémicycle, on a eu droit de la part des partis de l'Alliance présidentielle, dans la pure tradition des thuriféraires de cour, à un véritable récital en faveur du “oui”. À telle enseigne que l'on se demanda si, quelque part, la partition jouée n'obéissait pas au même chef d'orchestre. Autant les partis de l'Alliance que le groupe des indépendants ont sonné le “hallali” au même moment. Et c'est la première fois, en effet, qu'on assiste à cette effervescence à l'Assemblée à la veille d'un vote d'un projet de loi. “La protection des symboles de la Révolution est un grand message pour nous tous. Il traduit la grandeur de la Révolution”, explique d'emblée Miloud Chorfi, chef de groupe parlementaire RND et lieutenant de Ouyahia. “On va voter oui et en force pour concrétiser la volonté du peuple pour le changement”, justifie-t-il lors de la conférence de presse conjointe avec ses “alliés” au sein de l'hémicycle. À l'endroit des opposants du projet présidentiel, Miloud Chorfi décoche une flèche. Pour sa part, Layachi Daâdoua, chef du groupe parlementaire FLN, estime “nécessaire” la révision car celle de 1996, soutient-il, s'est faite dans une conjoncture difficile. “C'est une demande des partis de l'alliance. La révision est une nécessité. Et on souhaite même une révision en profondeur”, affirme cette nouvelle figure de l'école du FLN. Dans un discours qui emprunte beaucoup à la langue de bois, le MSP, confit en la culture de la versatilité, par la voix de Belkaïd Abdelaziz soutient, lui, que son parti “s'est allié avec les autres pour le changement, la concrétisation des libertés et le renforcement des constantes”. Pourquoi les partis de l'alliance ne se sont pas réunis pour prendre une position commune ? interroge une consœur. “Chaque parti au niveau de ses structures s'est déjà exprimé (…) L'alliance est en bonne santé. On ne s'est pas réuni car l'agenda était chargé pour chaque parti. Nous allons, nous l'espérons, nous réunir dans les prochaines semaines”, affirme Miloud Chorfi. “Le Président s'est contenté d'une révision partielle, on ne voit pas d'inconvénient à ce qu'il y ait une révision en profondeur. L'alliance va prendre une décision au moment opportun”, ajoute-t-il. Craignant probablement que son “allié” ne lui vole la vedette de la revendication, Daâdoua Layachi tente une rectification qui dissimule mal les divergences en sourdine qui minent l'entité présidentielle. “On est une alliance, mais chaque parti est autonome. Il est vrai que parfois on diverge, mais pour nous, nous continuons à revendiquer une révision en profondeur à travers un référendum”. Le FLN, patrimoine du peuple algérien, est-il concerné par l'amendement qui stipule la défense des symboles de la Révolution ? interroge Liberté. “La Constitution reflète les orientations de la nation”, répond, confus, Daâdoua. Où est la volonté populaire lorsque la révision passe par un Parlement élu à moins de 35% ? Après un silence gêné et un “zapping” de la question, les trois conférenciers, relancés par un confrère, se hasardent à quelques réponses approximatives. “La volonté populaire, c'est choisir celui qui nous représente (…) Quant aux élections, tout le monde sait que la participation n'est pas toujours importante en raison de beaucoup de facteurs (…)”, affirme Chorfi. “La discussion maintenant est sur le texte de loi, pas sur la représentation”, reprend maladroitement Daâdoua. À un étage au-dessus, les indépendants, eux, rappellent qu'ils voteront en faveur du projet. Ils se payent même quelques conseils. “Les députés qui veulent voter non sont dans l'erreur.” Y a-t-il de la place à l'opposition ? Karim Kebir