D'ici à l'horizon 2013, l'Algérie investira pour un montant qui dépasse les 100 milliards de dollars dans le secteur de l'énergie. Sonatrach, à elle seule, prévoit une enveloppe de l'ordre de 65,3 milliards de dollars dont 45 milliards de dollars sont des projets d'investissements matures, c'est-à-dire remplissant toutes les conditions requises et 20 milliards de dollars supplémentaires sont en option. Il est également envisagé de lancer des projets estimés à 28,6 milliards de dollars dans la pétrochimie. Outre les projets de Sonelgaz, évalués à plus de 6 milliards de dollars, des investissements sont aussi prévus à l'international d'une valeur de 1,8 milliard de dollars. Toute cette ambitieuse opération pose, cependant, une problématique de financement de tous ces projets d'envergure. Autrement dit, comment obtenir cette mirobolante somme qui dépasse en réalité les 100 milliards de dollars, pour pouvoir concrétiser une telle action ? En ces temps de crise et le risque de ses répercussions sur notre pays, il faut réfléchir avant de prendre une décision dans ce sens. L'incertitude qui règnent en maître à travers le monde poussent les dirigeants et les experts les plus avertis à prendre du recul pour une meilleure réflexion sur la réaction face à la crise. Devant une telle situation, Abdelatif Benachenhou, ex-ministre des Finances, s'interroge sur l'indispensabilité du programme d'investissement tracé. “Est-ce que tout ce qui est envisagé dans ce programme est indispensable ?”, se demande-t-il. Revenant sur l'origine de la crise financière mondiale, le conseiller auprès du président de la république, s'interroge sur les capacités des politiques publiques occidentales à restaurer la croissance ,puisqu'elles sont en récession qui risque de durer deux ou trois ans. C'est pour lui une crise qui s'est diffusée à travers les secteurs exportateurs des différentes économies, notamment celle de la Chine. Le second point évoqué par M. Benachenhou a trait au marché pétrolier. À court terme, la “période n'est pas troublée, mais déprimée”, indiquera-t-il. On assiste actuellement à un tassement de la croissance marquée par une demande américaine en pétrole en baisse de moins de 3 millions de barils/jour. Une restriction de la demande due évidemment à la récession provoquée par la crise. “La période n'est pas troublée, mais déprimée” Les avis divergent sur la situation des prix 45 dollars le baril, 50 dollars ou 70 dollars… “Vous voyez que c'est une affaire sérieuse”, avertira-t-il. Conséquences présagées par l'ex-ministre : report de projets d'investissements de certaines sociétés. Des problèmes vont également se poser dans l'industrie pétrolière surtout en pétrochimie… Toutefois, à moyen terme, l'Opep, affirme M. Benachenhou, va gagner en force et les prix vont reprendre leur tendance à la hausse. L'autre question abordée par l'intervenant concerne la structure des investissements en Algérie, assurés à 85% du total par des sociétés publiques, voire 90%, si l'on ajoute les investissements aidés par l'Etat. Pour une croissance jugée molle entre 2006 et 2007, elle deviendra, selon lui, encore “un peu plus molle” et avoisinera 3%. Une telle situation va, en outre, engendrer, estime M. Benachenhou, une restriction de l'épargne nationale qui est concentrée à raison de 75% chez deux ou trois acteurs principaux. Pour Abdelatif Benachenhou, il n'est pas mauvais si l'on regarde dans les projets d'investissements publics, notamment ceux de l'Etat, de Sonatrach et de Sonelgaz pour un éventuel report ou un “rabotage” de certains projets. Car, des projets tels que l'électricité, le dessalement de l'eau de mer… ont, avouera-t-il, un impact budgétaire actuel et un autre futur à travers la garantie de l'Etat. Il existe donc, expliquera M. Benachenhou, un espace budgétaire qui s'appelle “garantie de l'Etat”. “Supposons que ces espaces budgétaires n'auront pas les mêmes niveaux que nous souhaitons ?”, s'interroge-t-il. Sur un autre registre, il pense qu'il faut regarder de près les dépenses publiques dans les secteurs facteurs de croissance, que sont l'habitat et l'agriculture. Il avouera qu'il y a beaucoup à faire dans ces deux secteurs pour une efficacité dans leur participation à la croissance. Pour lui, les ressources publiques doivent aller à ceux qui en ont vraiment besoin, c'est-à-dire aux plus pauvres vivant dans les zones rurales reculées. Badreddine KHRIS