Les hôtels publics algériens, qu'ils soient rentables ou en difficulté, n'arrivent pas à trouver de repreneurs depuis le lancement, en 1999, de la première opération de privatisation initiée par les ex-Fonds de participation. Si l'on ne regarde pas du côté des hôtels, type balnéaire, structurellement déficitaires pour cause de non-rentabilité, on ne se bouscule pas, non plus, au portillon des hôtels urbains pourtant à très fort taux de rentabilité. Entre temps, à une exception ou deux, les conditions dans lesquelles s'est déroulée la cession de certains établissements, tels que le Hidab de Sétif ou l'Orient de Annaba, donnent un coup dur à la crédibilité de toute la politique de privatisation. En 1999, aucun de la centaine des établissements proposés à la cession n'a trouvé de repreneurs. Les modalités de cession de l'époque étaient jugées non réalisables et exprimaient le manque d'une volonté politique pour mener à terme les réformes. Entre temps, de nouveaux textes ont été promulgués levant les contraintes relatives, notamment, aux modalités du paiement. La libération intégrale du montant de cession n'est plus une obligation et l'évaluation du patrimoine est devenue plus pragmatique. Même constat pour les nouvelles techniques d'évaluation des offres de reprise jugées plus souples. Ainsi, le signe indien a été vaincu avec la campagne de 2004. Des 23 hôtels proposés à la privatisation, seuls 5 établissements ont trouvé repreneurs. Le Hidab de Sétif, l'Orient de Annaba, la station thermale de Hammam Melouane de Blida, le Grand-Hôtel d'Oran et les Zianides de Tlemcen. C'était déjà important, surtout que les établissements cédés étaient financièrement viables et la réussite de leurs acquéreurs est censée motiver les investisseurs indécis. Deux années après, soit le 1er janvier 2006, de ces 5 établissements, seuls les hôtels Hidab et l'Orient ont été cédés dans les délais. Aujourd'hui, quatre ans après, le bilan ne fait pas l'unanimité. Le 3 étoiles de Aïn El-Fouara risque de revenir dans le giron de l'Etat. Exception du paiement de l'apport initial, aucune annuité n'a été payée depuis trois ans et l'affaire est devant les tribunaux. L'acquéreur de l'hôtel l'Orient de Annaba, lui, en plus de n'avoir jamais payé un centime, demande carrément à l'Etat de reprendre son bien. Au même moment, l'hôtel se retrouve dans un état de délabrement avancé et la situation de ses employés, qui ont recouru à une série de grèves de la faim, est déplorable. La justice vient de leur donner raison dans l'un des multiples procès qu'ils ont intentés en justice. La cession de l'hôtel les Zianides, elle, a été avortée avant terme. Un différend entre les trois acheteurs a arrêté la procédure à mi-chemin et l'Etat a gardé son bien dont elle vient de terminer la rénovation en attendant de voir mieux. En 2005, un deuxième lot de 14 hôtels a été proposé à la privatisation. Parmi ces derniers, 12 ont suscité l'intérêt d'éventuels repreneurs. Aux dernières nouvelles, seuls les deux très rentables hôtels, ce qui est normal dans le monde des affaires et non une tare, sont passés du portefeuille public au portefeuille privé. Il s'agit du Salem de Skikda et du Riad de Sidi Fredj sur la côte algéroise. D'autres hôtels, pourtant de véritables “vaches laitières et stars”, pour reprendre les termes du management, ont vu leurs acquéreurs potentiels faire volte-face à la dernière minute. C'est le cas de l'hôtel Panoramique de Constantine. Côté climat social chez le privatisable, c'est tout sauf la quiétude. Le cas de l'hôtel Hidab a fait tache d'huile. Ainsi, le collectif des travailleurs de l'hôtel Salem de Skikda, qui détient le monopole sur le tourisme d'affaires de la deuxième ville pétrochimique du pays, a interdit, une année durant, au repreneur d'accéder aux lieux. Ce dernier ne le fera qu'une fois la prime de privatisation a été versée à chaque employé. Un droit, disent les uns, une sorte de dîme, disent les autres. La même revendication relative à la prime de privatisation est soulevée par les employés de l'hôtel Riad qui est passée dans le portefeuille d'une entreprise libanaise. Presque dix ans après le lancement de la première opération, la privatisation des hôtels en Algérie est une politique qui cherche toujours ses marques, tant que des réponses claires à des questions précises ne sont pas données. “Pourquoi privatise-t-on ?” est l'une de ces questions. Toutefois, tôt ou tard, l'Etat devra se débarrasser de la gestion de ces entreprises. Il est inadmissible qu'un Etat qui aspire à la modernité gère des lits, des couverts et des bars. Car rentable ou pas, l'hôtellerie n'est que cela. M. K.