Que reste-t-il du vaste massif forestier de Boumahni qui s'étend sur le territoire de trois communes (Aïn Zaouia, Draâ El Mizan et Aït Yahia Moussa) ? Le désastre continue sans que personne daigne lever le petit doigt. “C'est un crime !” s'exclame toute personne passant devant ces maquis. Pas moins de trois facteurs sont à l'origine de cette déforestation à outrance. D'abord, il est peut-être temps de revenir sur les incendies qui ont ravagé plus de 60 hectares. Effectivement, la fin du mois de septembre dernier a été la plus désastreuse. Il ne reste presque plus de chêne-liège ni de lentisques ou encore de sous-bois. De loin, on ne peut voir que ces étendues de cendre. La deuxième pratique qui commence à prendre de l'ampleur est indubitablement celle pratiquée par les braconniers si on peut les désigner de la sorte. Effectivement, des personnes sans scrupules se livrent quotidiennement à l'abattage de centaines d'arbres dans le seul but de soutirer des gains au détriment de la faune et de la flore. Selon des riverains, dès les premiers jours d'automne, le bruit strident des tronçonneuses s'élève de partout. “On se demande comment ces gens n'ont peur ni des mines enfouies dans ce vaste territoire ni des groupes armés dont les repaires se trouvent dans cette forêt”, s'inquiète un habitant du village d'Ath Mouh-Kaci relevant de la commune d'Aït Yahia Moussa. Pour notre interlocuteur, des remorques entières chargées de pieds-droits utilisés dans les travaux de construction ou encore de sous-bois destiné au chauffage font des va-et-vient au su et au vu de tout le monde. “Les services des forêts n'inspectent plus les lieux notamment depuis l'avènement du terrorisme”, lâche un second intervenant. D'autres ont carrément procédé au défrichage de pans entiers de cette forêt utilisés non seulement pour la greffe des oléastres des oliviers sauvages mais dans certains cas pour carrément des constructions illicites. Certes, les services forestiers ont adressé à ces citoyens des mises en demeure, en vain. Il faut dire que cette forêt subit de jour en jour des agressions à telle enseigne que les animaux qui y vivent l'ont désertée. À en croire certaines sources, des “trabendistes” du bois qui se cachent parfois derrière le subterfuge du chômage ont fait fortune par ce procédé que d'aucuns qualifient de crime envers la nature. “Ne perdez pas de vue qu'avec les sommes amassées de la vente de bois, certains roulent avec des véhicules payés à coups de millions de centimes. Une remorque de tracteur remplie de bois de chauffage est cédée à plus de 7 000 DA”, nous apprend un autre citoyen. Et de nous expliquer : “Le comble est que cette forêt, propriété exclusive de la conservation forestière est parfois partagée en parts égales entre ces trabendistes qui emploient des jeunes payés à la journée”. Personne ne peut imaginer qu'une telle pratique sur un terrain d'autrui est mise sur pied comme si ces “maîtres des lieux” se partagent le butin de chasse. Alors que ceux qui sont dans un besoin domestique de ce bois ne s'aventurent pas dans ce territoire. Les autorités sont, elles aussi, impuissantes devant un tel phénomène, car elles ne disposent d'aucun moyen pour intervenir. Il est attendu que les services des forêts à qui revient le droit de veiller sur ce patrimoine fassent des sorties inopinées sur les lieux quitte à recruter des jeunes chômeurs en vue de chasser les intrus qui font trop de mal au massif forestier de Boumahni. O. GHILES