Perchée sur une colline, la localité de Menaouer, distante d'une dizaine de kilomètres seulement d'El-Bordj, fait désormais partie de l'histoire de la guerre de Libération. la région, caractérisée par des massifs forestiers très denses, a été le théâtre de plusieurs affrontements et a enregistré le passage de plusieurs chefs de zone. Elle a été élevée au rang de commune à la suite du dernier découpage administratif, car, antérieurement à cette date, elle dépendait de la commune-mère El-Bordj. Elle doit son nouveau statut au développement de son tissu urbain, au nombre important de réalisations d'infrastructures socio-éducatives implantées sur son territoire, mais également à la densité de sa population et à la superficie importante dont elle dispose et dont une partie a été morcelée en lots de terrain à bâtir destinés aux citoyens pour la construction de nouveaux logements. Cet atout a été exploité par les élus locaux pour intéresser la population locale et encourager le retour de ceux qui ont opté pour l'exil. À vocation agropastorale, la région permet à des centaines de familles de vivre directement ou indirectement du travail de la terre très fertile et au sous-sol très riche en ressources hydriques. Pourtant, c'est dans des circonstances douloureuses que la commune de Menaouer est sortie de l'anonymat, puisque l'opération relative aux élections locales du 29 novembre 2006 a été émaillée d'incidents. Tout a commencer le jeudi, jour du scrutin, vers 18h30, selon la déclaration de quelques jeunes du village, quand les encadreurs d'un bureau de vote ont procédé à la fermeture de la porte d'entrée pour effectuer le dépouillement, refusant par la même la présence des représentants des partis politiques engagés dans la course. Redoutant la pratique de la fraude électorale, des dizaines de jeunes, gagnés par la colère et se sentant humiliés, ont défoncé la porte, créant ainsi un climat de suspicion. Les urnes ont été incendiées et le message est parvenu à d'autres jeunes mobilisés pour cette opération qui n'ont pas hésité à bloquer tous les accès menant à la commune à l'aide de branches, de pierres et autres objets utiles, permettant à leurs complices de mettre le feu à une classe. Face à la tournure des événements et la tension qui montait, les agents de sécurité présents sur les lieux ont demandé du renfort, et c'est ainsi que tout un bataillon de la Gendarmerie nationale a été dépêché pour prêter main-forte à leurs collègue qui se sont sentis menacés. Et ce n'est que le lendemain que le calme est revenu, que les voies d'accès ont été dégagées et que les émeutiers ont été dispersés. Dans cette petite commune, ces événements, les premiers du genre, restent encore vivaces dans la mémoire de la population même si la version des faits varie d'un interlocuteur à un autre et que le mensonge se mêle à la vérité. Pour les uns, il s'agit de la déception affichée par les membres du clan perdant qui ont tenté de déverser leur frustration dans le but évident d'entraver la bonne marche de l'opération et refuser d'admettre les résultats des urnes. À l'inverse, d'autres prétendent que les encadreurs censés adopter une position neutre étaient à la solde d'une partie des candidats et ont agi pour les aider par l'usage de la fraude. Si pour les élus, cet épisode est oublié et que leur regard est tourné vers l'intérêt général de la commune, la haine sommeille à l'intérieur des cœurs des surclassés qui n'attendent que l'occasion pour exprimer leur vengeance. À l'instar des autres communes de la wilaya, Menaouer compte une population qui reste très attachée aux us et coutumes et au sein de laquelle l'esprit tribal domine et la rivalité familiale exercée selon une tradition bien établie et qui ne date pas d'hier. Pourtant, les jeunes de la nouvelle génération bénéficient de circonstances plus favorables que leurs ancêtres traduites par la disponibilité d'infrastructures socio-éducatives dont ils ont tiré profit et censées les extraire de ce cercle fermé. L'enseignement primaire est dispensé aux enfants en âge d'être scolarisés. Si pour le premier palier, le problème ne se pose pas, compte tenu du nombre d'écoles et de classes suffisantes, ce n'est pas le cas pour le moyen, avec un seul établissement et des classes surchargées fonctionnant avec 47 et 50 élèves, une situation criante et qui mérite l'intervention des autorités de wilaya et des responsables de l'éducation. Le problème est plus crucial pour l'enseignement secondaire, car la commune ne dispose pas de lycée et les élèves admis sont affectés à El-Bordj, contraints d'effectuer quotidiennement la navette pour poursuivre leurs études. Ils sont près de 200 adolescents à braver le froid, la pluie, la neige ou la chaleur estivale et exposés aux risques pouvant survenir au cours du trajet, plus particulièrement les jeunes filles. Dans de telles circonstances difficiles, certains parents n'ont pas hésité à mettre un terme à la scolarité de leurs filles. Implantée sur un territoire qui compte 97 km2 pour une population avoisinant 10 000 habitants, la commune de Menaouer assume avec difficulté son statut avec un budget déficitaire en l'absence de ressources et tributaire des subventions d'équilibre allouées par les pouvoirs publics. En matière de réalisations, les projets en cours se comptent sur les doigts d'une main et se limitent à la construction d'une annexe administrative, l'extension de l'AEP du douar Ouled Bendouba, la construction de 16 logements au douar Ouled Boualem et un forage au douar Boucetta. Pour l'année en cours, il est prévu le lancement de projets liés à la réalisation des VRD aux douars Starsa, Remassa et Khelalfa, des opérations jugées minimes pour une commune dont la population aspire à de meilleures conditions de vie et une bonne prise en charge des problèmes quotidiens. À ce rythme, la localité doit attendre longtemps pour sortir de l'isolement et les citoyens doivent prendre leur mal en patience pour bénéficier des bienfaits dont ils rêvent. A. B.