Beaucoup d'argent a été dépensé dans les différentes études relatives à la création de 13 sociétés économiques de développement (SED), prévues dans le cadre de la stratégie industrielle. Ya-t-il un malaise au sein du gouvernement ? La question mérite d'être posée, après la sortie quelque peu inattendue du Premier ministre, mercredi passé, lors d'une émission spéciale de la Radio nationale. Interrogé sur la mise en œuvre de la stratégie industrielle, M. Ouyahia a soutenu que cette stratégie n'a fait beaucoup plus l'objet de communication que d'action. Le Premier ministre a précisé que cette stratégie “n'a pas été adoptée en Conseil des ministres”, indiquant qu'elle “doit désormais être adaptée au papier millimétrique que sont les mesures prises par le chef de l'Etat”. Le Premier ministre vient en fait désavouer un de ses ministres qui, il n'y a pas longtemps, en janvier dernier, avait annoncé que les mesures relatives à la création des 9 grandes entreprises sur 13 grandes entreprises prévues “sont fin prêtes et le projet sera bientôt soumis au gouvernement”. Quatre cabinets de consultants étrangers, dont KPMG et Deloitte France, ont déjà défini la stratégie à suivre pour faire de ces 13 champions industriels une réalité. Les différentes études relatives à la création de ces sociétés économiques de développement (SED), prévues dans le cadre de la stratégie industrielle, sont quasiment finalisées. Les études de maturation, d'identification de périmètres ainsi que les business plans relatifs à ces futures sociétés ont été élaborées. Beaucoup d'argent a été dépensé dans cette affaire. Des réunions ont été organisées par le ministère de l'Industrie et de la Promotion des investissements, avec les secteurs et entreprises concernés. Parmi les secteurs “prioritaires” identifiés, on peut citer, entre autres, la branche pétrochimie, sidérurgie, aluminium ou l'agro-industrie... Le redéploiement sectoriel repose sur les activités industrielles manufacturières et la valorisation des ressources naturelles que recèle l'Algérie, tant dans la pétrochimie que la sidérurgie, les engrais ou les matériaux de construction, avec pour objectif de réaliser des partenariats public-privé et de réunir les conditions nécessaires au développement d'industries compétitives à même de préparer la substitution aux importations pour ensuite exporter des produits finis algériens. Les SED que l'Etat envisage de mettre en place seront organisées autour d'entités existantes. Il s'agit, entre autres, de Saidal dans la pharmacie, d'Air Algérie dans le transport aérien, de l'Entmv dans le transport maritime de voyageurs, de la Snvi dans les véhicules industriels, de l'Enie dans l'électronique... Le ministre des Finances, M. Karim Djoudi, avait indiqué à Oxford Business Group que les pouvoirs publics ont fixé une liste de 13 champions nationaux. Le président de la République, lui-même, dans un discours lu par le Chef du gouvernement, de l'époque Abdelaziz Belkhadem, lors des Assises nationales de l'industrie, qui se sont tenues à Alger du 26 au 28 février 2007, avait souligné la nécessité de la mise en œuvre d'une stratégie. Deux ans après les assises, le Premier ministre semble vouloir redéfinir les priorités. M. Ouyahia a souligné, par ailleurs, que la logique économique obéit à une “seule sélection”, qui se résume, a-t-il dit, au “plan de charge”. Pour le Premier ministre, les secteurs “sélectifs” en Algérie sont les secteurs du bâtiment, des travaux publics, ferroviaire, mécanique et même le médicament. “Bâtir des stratégies, c'est réunir les conditions nécessaires pour que ce qui a été investi ne soit pas perdu”, a-t-il ajouté. On efface et on recommence, semble suggérer le Premier ministre. M. Ouyahia a raison de dire qu'en matière de mise en œuvre de la stratégie industrielle, les choses semblent traîner en longueur. Il a raison de bousculer son ministre de l'Industrie. Mais porter les divergences sur la place publique, c'est montrer qu'au sein du gouvernement règne une certaine cacophonie. M. R.