La diversification de l'économie, la mise à niveau des entreprises, la mise en œuvre de la stratégie industrielle, l'assainissement du marché, le plan quinquennal de relance, tels sont ses principaux chantiers économiques. Sa tâche sera d'autant plus ardue que pèsent des incertitudes sur la durée de la crise financière mondiale. Après plusieurs jours de supputations et d'attente, le président Bouteflika a décidé de reconduire le Premier ministre Ahmed Ouyahia et toute l'équipe gouvernementale à l'exception de M. Soltani Abou Djerra qui quitte le gouvernement à sa demande, pour ramener le bateau MSP, qui commence à tanguer, à bon port. L'Exécutif pourra ainsi se remettre au travail et appliquer le programme décliné par le président de la République tout au long de la campagne électorale et lors de la cérémonie d'investiture. Le chef de l'Etat avait énoncé beaucoup de promesses. M. Abdelaziz Bouteflika avait déjà annoncé qu'il mettra, encore une fois, à la disposition des entreprises un plan de charge estimé à 150 milliards de dollars ; en dépit de la grave crise économique qui sévit à travers le monde, développement des infrastructures de transport terrestre, parachèvement de la modernisation de l'exploitation des ports, développement de la pétrochimie, de l'exploitation minière, ainsi que la promotion des énergies nouvelles, autant de promesses inscrites dans le programme électoral du président Bouteflika. Pour autant, la troisième mandature sera jugée à l'aune de trois défis que ce gouvernement reconduit a à relever : diversifier l'économie pour sortir de la dépendance des hydrocarbures, assainir le marché de plus en plus contrôlé par les spéculateurs et faire émerger une économie fondée sur la connaissance qui fait du progrès technique le facteur-clé de la croissance. La majorité des observateurs de l'économie algérienne considèrent que l'absence d'une politique publique efficace et déterminée de soutien à l'offre a été l'une des causes principales de la croissance molle réalisée, en dépit de l'ampleur des ressources engagées. L'économie algérienne est encore plus dépendante des hydrocarbures qu'elle ne l'était dans les années 1970 : 30% du PIB en 1970 ; 50% en 2008. En dépit d'injection de sommes considérables, l'économie algérienne, hors hydrocarbures se porte toujours mal. Le produit industriel à prix constant en 2007 est quasi le même qu'en 1983. La part du secteur des hydrocarbures dans la production de la richesse nationale est passée de 33% en 2002 à 55% en 2008. Les exportations hors hydrocarbures demeurent marginales, alors que les importations ont pris ces dernières années des proportions inquiétantes. Les dernières statistiques viennent, encore une fois, rappeler l'extrême vulnérabilité de l'économie nationale. En d'autres termes, les décisions qui ont été prises pour encourager l'émergence d'une économie hors hydrocarbures n'ont pas été appliquées. Dans ce cadre, quel est le sort que le Premier ministre réserve à la stratégie industrielle préparée par le ministère de l'Industrie et de la Promotion des investissements ? M. Ahmed Ouyahia avait estimé, en mars dernier, que la stratégie industrielle “a fait beaucoup plus l'objet de communication que d'action”. Tout en rappelant qu'elle n'a pas été adoptée en Conseil des ministres, il a affirmé qu'elle “doit désormais être adaptée au papier millimétrique que sont les mesures prises par le chef de l'Etat” et qu'il a commencé à mettre en œuvre. Beaucoup avaient alors parié sur le départ de M. Hamid Temmar qu'on dit proche du président de la République. Que veut dire sa reconduction à la tête du même département ? La stratégie industrielle sera-t-elle abandonnée alors que beaucoup d'argent a été dépensé dans les différentes études relatives à la création de 13 sociétés économiques de développement (SED) ? Le document sera-t-il revu et corrigé par Ouyahia ? Autant de questions qui méritent des réponses, peut-être dans le plan d'action que le Premier ministre aura à présenter à l'Assemblée populaire nationale. Mais là où le citoyen attend le gouvernement, c'est sur l'assainissement du marché. Le consommateur est pris en otage par les spéculateurs qui contrôlent les circuits de distribution, l'Etat, à travers le ministère du Commerce paraissant complètement absent. L'épisode de la pomme de terre est révélateur de la désorganisation qui règne dans ce secteur. En tout état de cause, la crise financière mondiale et la baisse des prix pétroliers mettent en lumière l'urgente nécessité d'accélérer les réformes structurelles pour diversifier l'économie et faciliter une croissance hors hydrocarbures soutenue. Certes toutes les institutions internationales affirment que l'Algérie semble à l'abri d'une contagion financière directe, mais le recul des prix pétroliers fragilisera sensiblement sa situation budgétaire et sa position extérieure. Le principal risque pour l'Algérie réside dans le recul très sensible projeté des recettes pétrolières ; si cette situation devait se prolonger, elle finirait, en effet, par ralentir le vaste programme d'investissements publics et la croissance des secteurs d'activité hors hydrocarbures. Meziane Rabhi