Durant la dernière visite de Ould Abbès à Batna, une femme en larmes l'a interpellé, elle a deux enfants atteints de la typhoïde qui sont hospitalisés. S'informer sur l'ampleur de l'épidémie, le nombre exact des personnes atteintes et leur situation sanitaire devient une tâche presque irréalisable. Du coup, la communication a cédé la place à la rumeur au point où l'on n'arrive pas à séparer l'information de l'intox. Ainsi, selon la rumeur, deux personnes ont succombé à la typhoïde. Côté direction de la santé, si on affirme la présence de l'épidémie, on infirme celle des décès. Selon cette source, toutes les personnes atteintes, une cinquantaine en tout dont plus de neuf cas confirmés, vont de mieux en mieux. Reste que cette version, l'opinion publique locale ne veut pas la croire. “On nous dit cela parce que chez nous, on confond tout et le secteur de la santé ne veut pas être taxé de trouble-fête en ces jours de campagne électorale”, dira avec ironie un habitant du quartier où l'épidémie s'est déclarée, la cité Annasr. En fait, le malheur des 52 ou 53 malades déclarés par la DSP n'est pas seulement la fièvre typhoïde, mais le sentiment d'être des invités indésirables dans un décor voulu féerique pour accueillir le candidat indépendant, Abdelaziz Bouteflika, jeudi dernier. Ces malades ainsi que leurs familles se sentent les oubliés durant cette période où la flore des opportunistes cherche à s'activer utilement.On peut comprendre ce qu'ils ont ressenti, ces victimes quand, au moment où plus d'une vingtaine d'entre eux étaient allongées sur leurs lits au sanatorium de Batna, à quelques mètres des lieux, dans les allées Ben Boulaïd, la fête battait son plein. Au même moment, un peu plus loin, les quartiers d'Annasr et la cité Chikhi étaient sans eau potable depuis deux semaines avec des citoyens livrés à eux-mêmes. “Il y a des familles qui ont plus d'un malade à l'hôpital”, dira un riverain. Un autre ajoute, “on a été livrés à nous-mêmes, ils étaient tous préoccupés par la campagne électorale et par la visite du président, on était la honte à cacher !”. Les travaux de fouille et de réhabilitation des conduites d'eau potable et du réseau d'assainissement entamés depuis quelques jours par l'Office national de l'assainissement (ONA) et l'ADE ont été achevés et on ne sait toujours pas à quoi ils ont abouti. On nous a tout simplement fait savoir que la direction générale de l'ONA a envoyé une équipe avec des moyens de détection et de diagnostic très performants, dont une caméra qu'ils font glisser à l'intérieur du circuit pour trouver les cross connexions qui peuvent être à l'origine de ce malheur. Seulement, l'origine du malheur ne date pas d'aujourd'hui, puisque le problème des conduites d'AEP et du réseau d'assainissement est aussi usé que les promesses des responsables qui se sont succédé à la tête de la ville de Batna. Le quartier d'Annasr, l'un des plus anciens de la ville, a émergé la veille de l'indépendance. Ses réseaux d'eau potable et d'assainissement datent des années 1950 et, depuis presque une dizaine d'années si ce n'est plus, ses habitants n'ont cessé de réclamer le renouvellement des canalisations. F. Lamia