La délégation algérienne était conduite par le regretté Krim Belkacem, représentant le FLN, vice-président, ministre de l'Intérieur dans le 3e Gouvernement provisoire de la République algérienne, dirigé par Ben Youcef Ben Khedda. Les représentants français étaient sous la direction de Louis Joxe, ministre dans l'Exécutif de Louis Debré. Des négociations secrètes ont débuté aux Rousses (frontière suisse) puis poursuivies, à partir du 7 mars 1962, à Evian-les-Bains. Ces pourparlers ont abouti à la signature des accords (au pluriel) le 18 mars 1962 entre les parties algérienne et française. De ces accords, des résolutions fondamentales ont pesé sur des faits historiques importants de l'Algérie. Un cessez-le-feu est décrété sur tout le territoire de la République algérienne à partir du 19 mars 1962 à midi (12h). Il met fin à la lutte armée de Libération nationale, déclenchée le 1er novembre 1954 au 19 mars 1962 (soit sept ans et demi), après 132 ans du joug colonial français en Algérie ; et affirme la souveraineté algérienne sur les trois départements : Alger, Oran, Constantine et les territoires militaires du sud-est, les Oasis et du sud-ouest, la Saoura, dans la plénitude de ses frontières intangibles, tracées et reconnues internationalement. Notons qu'une politique de colonies de peuplement, à l'instar des Amériques, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, de la Palestine et de l'Afrique du Sud avait été menée dans les trois départements du nord du pays : Alger, Oran et Constantine alors que le Sud était sous administration militaire. Seule l'Algérie a échappé à la dépossession de ses terres au détriment des autochtones. Ceci dit, pour bien comprendre ce résultat politique irréversible, il faut reprendre l'analyse de la situation antérieure, c'est-à-dire à compter de faits inédits. 1- Le FLN a décidé le transfert de la lutte armée en France. Cette approche met en danger la sécurité des Français, crée l'instabilité et procède à la mise en cause de l'ordre public. 2- Le putsch raté des généraux français en Algérie. En effet, il est impensable que l'armée française viendrait un jour mettre en cause une décision du pouvoir civil, issu d'une élection démocratique, émanation de la volonté du peuple français, souverain (dans la plupart des gouvernements de la Ve République la charge du ministère de la Défense nationale est confiée à une femme). Le 22 avril 1961, un quarteron de généraux (Challe, Jouhaud, Salan et Zeller), ainsi qualifié par De Gaulle, chef de l'Etat français, ont cru tenter de dévier le cours de l'histoire, destin irréversible de l'Algérie, pour maintenir l'Algérie dans le giron français, suite au référendum du 8 janvier 1961, tenu en France et en Algérie, accordant la confiance à la ligne tracée par le général De Gaulle pour une solution juste et rapide du conflit. L'échec de cette tentative des chefs militaires français a été implacable. Par ailleurs, la direction politique du FLN a exigé pour toute reprise de contact une seule et unique condition préalable, la question du Sahara comme partie indissociable de l'intégrité territoriale et de l'unité nationale. Ainsi, des rencontres préliminaires ont eu lieu entre, d'une part, Pompidou, Bruno de Leusse avec Boumendjel et Boulahrouf à Lucarne, le 20 février 1961, puis à Neuchâtel, le 5 mars 1961. Mais les véritables pourparlers ont débuté à Evian dans une atmosphère d'un pénible évènement puisque le 31 mars 1961, le maire de la ville d'Evian a été assassiné. Cette atmosphère, teintée d'un immense espoir de la fin de ce conflit, a amené l'instance politique algérienne à désigner, en août 1961, un nouveau Gouvernement provisoire de la République algérienne, à sa tête Ben Youcef Ben Khedda, pour mener les négociations avec la partie française. Alors que les évènements connaissent une accélération inattendue dans la bonne direction empruntée par les deux parties, un épisode sanglant va noircir le tableau. En effet, la communauté nationale établie en France, et particulièrement à Paris, va manifester le 17 octobre 1961 pour dénoncer le couvre-feu imposé aux Algériens par le préfet de la capitale française, Maurice Papon. Ces marches pacifiques de nos émigrés vont se dérouler tout le long du fleuve parisien, la Seine. Les forces, sur ordre de Papon, vont user d'une riposte sanglante en jetant les manifestants dans le fleuve parisien. Cette situation sanglante conclut à un message à deux volets : au FLN, un soutien indélébile du peuple algérien ; et au général De Gaulle, l'hostilité de la communauté des colons en Algérie à sa conduite dans le processus de la fin de ce conflit par l'abandon de l'Algérie française. Mais les deux parties, française et algérienne, vont consacrer leurs efforts à mener à bien leurs missions respectives. Leur détermination à aboutir à une solution mettant fin à une atroce et cruelle confrontation va enfin sceller les accords dits d'Evian le soir du 18 mars 1962, pour annoncer la fin officielle d'un conflit meurtrier par un sacrifice édifiant d'un million et demi de martyrs algériens, un cessez-le-feu entrant en vigueur le 19 mars 1962, à midi, débouchant sur l'indépendance, proclamée par la partie algérienne à compter du 5 juillet 1962, après un référendum d'autodétermination du peuple algérien et consacrant le recouvrement de la souveraineté algérienne dans le cadre de l'intégrité territoriale, de l'unité nationale dans ses frontières intangibles, reconnues internationalement. En réalité, toutes les rencontres algéro-françaises ont à chaque fois été bloquées par la question épineuse du Sahara. Les Français ont accepté l'indépendance de l'Algérie, constituée par les trois départements d'Alger d'Oran et de Constantine (l'Algérie du Nord, colonies de peuplement, gérées sous régime presque identique à un apartheid), et le Sud, sous l'autorité militaire, constitué par les deux contrastes géographiques distincts que sont les Oasis à l'est et la Saoura à l'ouest, qualifiées administrativement de Territoires militaires du Sud. La France a reconnu l'indépendance de l'Algérie le 3 juillet 1962, parue au Journal officiel de la République française. Gloire à nos chouhada. * Moudjahid et fils de moudjahid