L'année dernière, la Palestine a perdu, non sans grande douleur, son poète, son chantre et son éternel “amant”, Mahmoud Darwish, qui l'a laissée ainsi orpheline, voire même abandonnée et livrée à elle-même. Mais comme les poètes talentueux ne meurent jamais, leurs écrits autant que leurs prises de position demeurent éternels. C'est dans cette perspective de mémoire et de reconnaissance envers un grand homme qui a dédié sa vie à une cause noble que l'espace Noun a abrité, jeudi dernier, dans un cadre intimiste, un récital poétique de Linda Khaled, qui a été accompagnée au violon par Amine Khettat, sous le regard de Darwish représenté par un tableau du plasticien Mustapha Boutadjine. Après une brève présentation, où la gérante de cette librairie a relaté la rencontre entre Linda et Amine — qui se sont rencontrés lors de la présentation de l'album de Brahim Tayeb le jeudi d'avant —, place aux poèmes tranchants, virulents et même romantiques de Mahmoud Darwish qui n'ont perdu, sous la voix de Linda Khaled, ni de leur virulence ni de leur douce révolte. En effet, celle-ci a déclamé le verbe de Darwish avec une grande émotion, transportant ainsi l'assistance vers d'autres lieux. Avec une voix grave et légèrement écrasée, Linda Khaled a déclamé le verbe de Darwish, alternant ainsi entre ses anciens et récents poèmes, mais qui ont toutefois deux points communs : la révolte et la Palestine, sa muse. Par ailleurs, il serait presque déplacé, inapproprié, voire indécent de présenter Mahmoud Darwish. En revanche, l'agencement des poèmes que nous a proposés Linda Khaled sont frappés par une logique implacable. Tous les débuts sont des fils conducteurs pour la construction d'un poème inédit : Pour notre pays, Si tu marches un jour dans une rue qui mène vers un précipice, Tu es prisonnier de toi-même, À El Qods, c'est-à-dire à l'intérieur des murs de la ville, Moi et les choses nous sommes les maîtres, Que ferions-nous avant cette mort ?, Nous survivons au lieu de vivre, Es-tu le fils d'un geôlier ?, Sur cette terre, Tu es en vie, Encore demain ! L'homme avait une place importante dans les poèmes de Mahmoud Darwish. Mahmoud Darwish avait une place importante dans le cœur de tous ceux qui ont eu vent de sa poésie et auprès de tous les peuples qui souffrent. Jeudi dernier, l'espace Noun a été envahi par un trop plein d'humanité. La boucle fut donc bouclée. Pour ne pas oublier… pour ne jamais oublier ! S. K.