Produite dans le cadre d'Alger capitale de la culture arabe 2007, El-Hayla (la fabuleuse) relate dans un cadre tragicomique, l'histoire d'une femme qui a perdu son mari mais qui le pleure encore et toujours, ne pouvant ainsi se résoudre à faire le deuil. Mais avec la force de son verbe, le Poète réussit à la sortir de son malheur en lui proposant de remplacer la mort par l'amour. Le Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi a abrité le week-end dernier deux représentations consécutives de la pièce El-Hayla (la fabuleuse) de l'association culturelle " Mouvement théâtrale de Koléa " (MTK), mise en scène par Youcef Taouint qui a également signée l'adaptation d'après l'œuvre Pavolweith Tolikov. Mais, l'issue des 90 minutes de spectacle, on avait plutôt l'impression, que El Hayla est plutôt une adaptation de L'Ours du dramaturge russe Anton Tchekhov. En effet, El Hayla, c'est l'histoire d'une femme très belle, très riche et très fidèle qui attend encore et toujours son mari, disparu dans un attentat et dont le corps n'a jamais été retrouvé. Sans nouvelles, El Hayla se morfond et se complait dans le chagrin. Un beau jour, un homme, Le Poète, inspiré par les forces du mal, prétend qu'il était l'associé de son mari et que ce dernier lui devait de l'argent. Bien qu'elle croule sous les propositions, notamment de Errabha et de Nmer, El Hayla succombe au charme du poète et en tombe follement amoureuse. Lui aussi l'aimera sincèrement et tous deux aspirent à une vie rangée. Mais c'est sans compter sur le sort qui leur joue des tours. Ne digérant pas sa défaite, Nmer décide de se venger : il fait croire à El Hayla que son mari est de retour. Celle-ci en état de choc, sombre dans la folie. La trame de la pièce tourne autour de trois personnages centraux : El Hayla, Nmer et le Poète. En fait, la première représente la fidélité, le second incarne la convoitise et la conscience ; quant au dernier, il serait l'ambition…démesurée. Quant à Errabha, présent dans presque toutes les scènes, il est la voix de la société et celle des ancêtres, notamment à travers les maximes et les dictons qu'il avance tout au long de la pièce. Il est également le fil conducteur entre les personnages. Par ailleurs, une certaine lourdeur et un semblant de déjà vu, ont traversé la pièce qui est passé par quelques moments difficiles, faussant ainsi le propos. Ce dernier est quelque peu pertinent mais globalement manquait de profondeur et de clarté. En fait, ce propos –éminemment humain- tournant autour d'une envie apparente de démontrer que le passé finit toujours par ressurgir et par rattraper les êtres, lorsqu'ils s'y attendent le moins. Ce passé justement, aura-t-il un jour raison de nous ? Là est la question. El Hayla évoque également le matérialisme de la société dans laquelle nous évoluons où toutes les relations humaines sont faussées par l'argent et les intérêts. En revanche, bien qu'il y ait une intrigue, le texte n'est pas très accrocheur car il joue un peu trop et sans grande nécessité sur le langage de la rue et sur les dictons. Le jeu des comédiens a été traversé par des incohérences car, hormis Errabha (incarné par le comédien Mohamed Amine Ikhelef) largement habité par le personnage qu'il incarnait, personne n'a été à la hauteur de son personnage. El Hayla interprétée par Kamélia Bendrici a eu de gros problèmes d'articulations et de dictions ; Mohamed Halimouche alias Nmer n'a pas assez d'expérience pour porter un rôle aussi important. De son coté, Youcef Habouche a campé le rôle du Poète (qui pactise avec le Diable) et l'a interprété avec intelligence et tout en retenue. Bref, El Hayla a connu des hauts et des bas ; elle n'est pas si fabuleuse que cela, mais reste une tentative et une expérience (surtout pour les jeunes comédiens) intéressante.