Encore une fois le leader libyen a marqué de son empreinte un sommet arabe en s'en prenant au roi saoudien avant de se réconcilier avec lui par la suite, lors d'un rendez-vous où le président soudanais, El-Béchir, a nargué la Cour pénale internationale, et la question palestinienne a été carrément éludée. Prévu pour deux jours, le sommet arabe de Doha a clôturé ses travaux dès la première journée, donnant l'impression d'un épuisement à la va-vite de l'ordre du jour. Même la question palestinienne, sujet central de la réunion en raison des développements dans la région avec l'arrivée d'un gouvernement extrémiste dirigée par Netanyahu en Israël, a été pratiquement évacuée en un temps record à travers le renouvellement de l'offre de paix arabe et le soutien à l'Autorité palestinienne. Pour rester dans le même ordre d'idées, le président soudanais, qui a nargué la Cour pénale internationale de Doha, a lui aussi bénéficié du soutien de ses pairs arabes, qui ont demandé l'annulation du mandat d'arrêt émis par la CPI à son encontre. Mais la vedette du sommet est revenue sans conteste au colonel Kadhafi, qui a une fois de plus fourni un show, dont il a le secret. S'en prenant de nouveau au roi d'Arabie Saoudite Abdallah, le leader de la révolution libyenne l'a interpellé vertement alors que l'émir du Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, hôte du sommet, achevait son discours avant de se retirer de la séance d'ouverture du sommet pour aller visiter un musée dans la capitale qatarie. “Cela fait six ans que vous évitez de m'affronter”, lancera-t-il en direction du roi Abdallah. Il faut dire que depuis la publication en juin 2004 d'articles de presse aux Etats-Unis et en Arabie Saoudite accusant M. Kadhafi d'avoir ourdi un complot dans le but d'assassiner Abdallah, alors prince héritier du royaume saoudien, les deux hommes sont en froid et s'affrontent à chaque fois qu'ils se rencontrent. Donnant l'impression de vouloir régler ce différend, Kadhafi dira : “Je suis prêt à te rendre visite et à t'accueillir en Libye”, et “je suis le doyen des dirigeants arabes, le roi des rois d'Afrique et l'imam des musulmans.” Les extraits montrés par la télévision d'Etat libyenne et repris l'agence d'information Jana, le colonel Kadhafi a affirmé : “Je dis à mon frère Abdallah que, depuis six ans, tu me fuis et tu as peur de m'affronter. Je voudrais te rassurer : il ne faut pas avoir peur. Je te dis qu'après six ans, il a été prouvé que c'est toi dont le passé est fait de mensonges et qui fait face à la mort.” Poursuivant son attaque, il ajoutera : “Toi, tu es le produit de la Grande-Bretagne et le protégé des Etats-Unis”, mais, “en respect pour la nation arabe, je considère que le problème personnel qui nous oppose est fini et je suis prêt à te rendre visite et à t'accueillir en Libye”, pour ensuite sortir de la salle de conférences. Outré, le roi Abdallah a quitté la salle à son tour, avant d'y revenir un peu plus tard, apparemment à la suite d'une intervention des responsables qataris. Ceci étant, les deux hommes se sont rencontrés un peu plus tard sous l'égide du Qatar, selon un haut responsable libyen, Ahmad Kadhaf Al-dam. Ce dernier déclarera que “le différend né d'un malentendu est clos, et le leader libyen est soucieux que la nation se consacre à affronter les dangers qui la guettent”. Selon lui, “les résultats de la rencontre auront un impact positif sur les relations interarabes”. Au cours de la rencontre, organisée pendant une heure autour d'un déjeuner offert par l'émir du Qatar dans son palais, “les deux dirigeants ont échangé les invitations” pour des visites dans leurs pays respectifs, a indiqué la même source. Merzak Tigrine