Décidément, rien ne va plus à Sonatro où une grève a été encore une fois déclenchée par les travailleurs à l'appel de leur syndicat. Même si seulement 130 sur les 2 000 travailleurs que compte l'entreprise étaient présents hier devant le siège de l'entreprise à Réghaïa, ce mouvement a été une occasion ayant permis aux syndicalistes et aux travailleurs grévistes d'exprimer leurs préoccupations et inquiétudes quant au devenir de leur entreprise. Les protestataires s'en prennent notamment aux dirigeants de l'entreprise, les accusant d'avoir conduit Sonatro et ses unités à la faillite. “L'entreprise navigue à vue et nous ne disposons d'aucun plan de charge digne de ce nom”, dira un membre du syndicat qui précise que “plusieurs projets confiés à l'entreprise ont été résiliés pour des problèmes liés à la mauvaise gestion”. Il cite, comme exemple, le marché de l'aérodrome de Tindouf d'un montant de 105 milliards qui a été résilié aux torts de l'entreprise, ainsi que le marché de revêtement d'un tronçon de route à Oued Slama d'un montant de 30 milliards, lui aussi résilié dans les mêmes conditions, explique-t-il. L'autre marché résilié est celui de la voie de dédoublement de Si-Mustapha, qui a fait perdre à l'entreprise plus de 50 milliards, indique un syndicaliste de l'unité UGTCE de Tizi Ouzou, qui précise que son unité qui emploie plus de 150 travailleurs est sans plan de charge. “On nous a même coupé l'eau pour non-paiement des factures à l'ADE”, ajoute-t-il. Un autre syndicaliste évoque ce qu'il a qualifié d'affaire de la station de concassage d'une capacité de 400 tonnes/h, qui n'a même pas été dédouanée alors qu'elle a été acquise à coups de plusieurs millions d'euros en 2006, précise-t-il. Les travailleurs parlent aussi de “150 000 m3 de gravier qui auraient disparu de la station de Souidania, sans que les dirigeants ne s'en inquiètent”, comme ils indiquent que “plus de 65% de matériel de l'entreprise, y compris les 14 stations de concassage, ne fonctionnement pas”. L'autre problème évoqué est celui “des congés de récupération par anticipation octroyés aux travailleurs sans respect de la législation du travail, ainsi que celui des œuvres sociales bloquées depuis plus de cinq ans”. De nombreux autres problèmes ont été également cités par les protestataires qui exigent l'intervention des responsables de la Société de gestion et de participation (SGP) dont ils dépendent. Contactés par nos soins, les responsables de l'entreprise réfutent les affirmations des travailleurs grévistes qui, selon eux, ne représentent pas les 2 000 autres travailleurs qui sont tous à leur poste. Pour le directeur de l'entreprise, ce débrayage est illégal et un huissier de justice a fait le constat sur place. “Le SG de l'UGTA M. Sidi-Saïd a été même saisi de la conduite du SG du syndicat d'entreprise dont nous ne reconnaissons pas la légalité.” M. Attouchi s'est étonné pour sa part que “ce mouvement soit déclenché au moment où ce pseudo-secrétaire général a reçu une convocation pour passer en conseil de discipline, alors qu'il n'a même pas bougé lorsque les travailleurs cumulaient cinq mois sans salaire”, précise-t-il. Pour lui, les deux marchés ont été résiliés à cause des grèves illégales déclenchées par ce syndicaliste qui est censé respecter la législation du travail de son pays et défendre le secteur économique. “Comment voulez-vous mener un projet à terme avec plus de deux mois d'arrêt de travail cumulés en l'espace d'une année ?”, précise-t-il. Pour les responsables de l'entreprise, aucune station n'est à l'arrêt et “l'entreprise peut s'en sortir mieux pour peu qu'il y ait un syndicat représentatif, légal et soucieux de l'intérêt de Sonatro”, ajoutent-ils. Le directeur de l'unité de Tizi Ouzou M. Trabzi a, pour sa part, rejeté les accusations des syndicalistes, affirmant que “son unité a un plan de charge conséquent, mais s'inquiète des agissements de certaines personnes qui risquent de nuire à la crédibilité de son unité qui a la charge actuellement d'un projet avec l'entreprise française Razel au barrage de Koudiat Azzedoune”, indique-t-il. Pour les congés de récupération, M. Attouchi affirme qu'on ne peut pas signer d'accords collectifs parce que nous n'avons pas de syndicat légal. “Les sections syndicales, dont les mandats sont arrivés à terme, n'ont pas été renouvelés depuis plusieurs années”, indique-t-il. Un responsable nous a même affirmé que si ce climat continue, ce sont plus de 2 000 emplois qui risquent de disparaître. Il en veut pour preuve le chiffre d'affaires de l'entreprise qui était de 400 milliards en 2004, et qui est passé à 70 en 2009, précise-t-il. M. T.