Les agglomérations secondaires dépendant de la commune et de la daïra de Maghnia, telles que Chebikia, Akid-Lotfi, Zerriga, Akid-Abbès et Bettaim, sont devenues de véritables zones enclavées. Le manque d'eau et l'absence de routes praticables, de transport scolaire, de mosquées, d'écoles et de centres de santé pour certaines d'entre elles ont plongé ces dernières dans un véritable marasme social, culturel et économique. Prises en otage par les cartels de la contrebande de la région, ces populations rurales, pour la plupart agriculteurs ou éleveurs, sont totalement ignorées de leurs élus et de l'administration locale et ne savent plus à quel saint se vouer. Ici à Chebikia, où nous nous sommes rendus en premier lieu, les nombreux citoyens que nous avons rencontrés se plaignent du sous-développement chronique de leur village. Parmi les problèmes les plus récurrents, ils citeront celui de l'extension du village. Ce dernier renferme aujourd'hui plusieurs milliers d'habitants dont la majorité sont de jeunes ménages qui, pour la plupart, cohabitent avec leurs parents ; nombre d'entre eux vivent à quatre ou cinq familles dans une seule et même demeure, ce qui a engendré de nombreux maux au sein de la cellule familiale. Ici, les ruraux, poursuivent nos interlocuteurs, sont très réfractaires aux constructions du genre “immeuble” et préfèrent construire leurs demeures selon la tradition ancestrale afin de pouvoir préserver leur espace vital. À cet effet, disent-ils, nous avons déposé pas moins d'une centaine de dossiers de demandes d'attribution de lots à bâtir restés à ce jour sans suite. Lors de son inauguration par feu le président Houari Boumediène, notre village avait été doté d'un centre culturel, d'un centre d'apprentissage de couture, d'une boulangerie collective et d'un marché. Aujourd'hui, toutes ces infrastructures qui font partie du patrimoine immobilier de la commune ont été squattées par des étrangers au village qui les ont transformées en maisons à usage d'habitation. Aucune disposition pour la réhabilitation de ces infrastructures n'a été prise. Le marché de la localité qui est dans un véritable état de délabrement fait l'objet de nombreuses convoitises, nous révèle-t-on. D'autres citoyens de la localité rencontrés sur place se plaignent, eux, de l'absence de personnel médical féminin au niveau de leur centre de santé. Nous refusons, disent-ils, pour cette raison de laisser nos filles et nos épouses malades aller se faire soigner au centre de santé. Parmi les nombreux autres problèmes que vit la population, nous citerons également l'absence de viabilisation, ainsi que la dégradation des voies de communication. Tous ces problèmes, ajoutés aux contraintes de développement (interdiction de fonçage de puits, nombreux problèmes liés aux terres concédées par l'Etat aux agriculteurs de la localité etc..), semblent contribuer, sans conteste, à attiser les rancœurs et le mécontentement des habitants de ces villages d'agriculteurs qui ne demandent qu'à participer au développement local, pour peu que l'administration locale daigne un tant soit peu se pencher sur leurs problèmes. Nous quittons maintenant la localité de Chebikia pour nous rendre vers celle de Akid-Lotfi, un village socialiste agricole situé sur le tracé frontalier distant d'une quinzaine de kilomètres de Maghnia. Là, la population rencontrée se plaint, elle aussi, de l'absence récurrente d'eau potable, une nécessité vitale pour les habitants. Quant aux structures sanitaires et culturelles, celles-ci font cruellement défaut, avons nous pu constater sur place. Un autre fléau, moins voyant celui-là, est celui de la contrebande. “Notre village est devenu un véritable repaire de contrebandiers venus on ne sait d'où et font obstacle à tout tentative de développement à la seule fin de conserver le contrôle de leur monopole dans le secteur”, révèlent nos interlocuteurs. AliMoussa Jamal