Tombé au champ d'honneur au début du mois de mai 1959 près d'Ouled Bouachra à Médéa, le chahid, sans tombe connue, est mort en soldat inconnu. En dehors des informations communiquées par le commandant Si Lakhdar Bouragraâ, un des proches compagnons du colonel Ahmed Bougara dit Si M'hamed, on ne peut prétendre connaître les circonstances de la mort du héros de la lutte de libération nationale. La commémoration du 50e anniversaire de sa mort organisée hier par l'Association Machaâl Echahid au centre de presse d'El Moudjahid a laissé plus d'un sur sa faim, notamment les jeunes confrères qui eurent beaucoup de mal à glaner les informations concernant la vie du chahid. Seul Si Lakhdar pouvait relater avec, faut-il le dire, une étonnante précision la période allant de mai 1956 à mai 1959 durant laquelle il avait des contacts permanents avec lui jusqu'à la mort du martyr. Il avait fait sa connaissance fortuitement du côté de hammam Mélouane alors que le chahid était en compagnie de Krim Belkacem, Abane Ramdane, Ben M'hidi et Amara Rachid qui se préparaient à assister au Congrès de la Soummam en août 1956. Ouvrant une parenthèse, le commandant Si Lakhdar fera allusion aux “calculs politiques” concernant la tenue de ce congrès soutenu par les uns et rejeté par les autres. L'idée de la tenue de ce congrès serait venue de quelques anciens de la guerre d'Indochine qui en firent part à Larbi Ben M'hidi. “Une histoire de clarifier la situation qui prévalait au sein des rangs de l'ALN, il n'y avait aucun programme et tout baignait dans le flou. D'un côté, les moudjahidine engagés par conviction de la lutte armée et de l'autre les mésalistes, les communistes, les chérifiens (Ben Chérif), les hommes de Belounis qui étaient opposés à cette idée”, dira l'ancien officier de l'ALN. Pour ce dernier, le manque de coordination entre les différentes régions et surtout de communication avec la population n'ont pas facilité l'adhésion au principe de la lutte armée. Le flou n'a été levé qu'après le Congrès de la Soummam dont les initiateurs sont qualifiés par Si Lakhdar de “nobles” tant la tâche était ardue. “Il est temps d'écrire l'histoire de la Révolution algérienne. La vraie !”, a-t-il souligné. Dans ce sens, il citera les massacres perpétrés durant la décennie noire. “Prenons le cas de Bentalha. Beaucoup de crimes, pas de coupables”, martèle-t-il. Revenant aux circonstances de la mort du colonel Si M'hamed Bougara, le conférencier tient à préciser qu'ils s'étaient quittés la veille de sa disparition, soit le 5 mai 1959 alors qu'ils étaient dans la zone d'Ouled Bouachra au nord de Ksar Boukhari. “Si M'hamed était depuis quelques jours perturbé. Plus particulièrement à son retour da la réunion qui s'était tenue dans la Wilaya II. Alors que je devait faire sortir ma katiba de la zone de danger (encerclée par l'armée française), il me conseille d'agir comme une guêpe. Piquer et prendre le départ car mes hommes étaient épuisés et des munitions manquaient. Informé que son PC était encerclé, le colonel Bougara revient à son point de départ à Ouled Bouachra. Un accrochage eut lieu à ce moment. Pendant trois ou quatre jours, nous n'avions pas de nouvelles de lui. Nous avons appris sa mort par un certain Kaddour El-Baghdadi, un rescapé de l'accrochage”, confie le commandant Bouragraâ. Pour sa part, le frère du chahid, Mohamed Bougara, a sollicité l'Etat afin d'intervenir auprès des autorités françaises pour rapatrier les archives pouvant aider à identifier l'endroit exact où est tombé en héros, le colonel Si M'hamed. Aujourd'hui, comme à l'accoutumée, les membres de sa famille, les compagnons d'arme se rendront à Ouled Bouachra pour commémorer le 50e anniversaire de sa mort.