“Laou kounta falastiniyane” traite de la difficulté d'être palestinien : c'est l'histoire d'une discorde entre un même peuple qui milite pour la même cause, mais c'est aussi l'histoire d'individus qui rencontrent la mort à chacun de leur pas. Dans le cadre de la manifestation “El-Qods capitale éternelle de la culture arabe”, le Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi a dévoilé dimanche dernier sa deuxième production de l'année 2009, intitulée Laou Kounta falastiniyane (Si tu étais palestinien), placé sous l'égide du directeur du TNA, M'hamed Benguettaf, mise en scène par Oussama Abbas Islam, d'après le texte du dramaturge syrien Mamdouh Oudouane. Laou Kounta falastiniyane, c'est l'histoire d'un groupe de résistants palestiniens (deux hommes et une femme) qui prennent en otage un archéologue israélien du nom de Moshé, son assistante, Sarah, et tuent un soldat israélien, dans un site archéologique. Coincés tous les cinq dans cet endroit et encerclés par la milice israélienne, le fossé se creuse entre les protagonistes. Sarah, l'assistante du professeur Moshé tente de séduire le chef des résistants, Yoghmour, et parvient presque à la piéger, n'était l'intervention de ses camarades qui le raisonnent. Les trois Palestiniens se disputent entre eux puisqu'ils ne sont pas de la même tendance politique, bien qu'ils militent et combattent pour la même cause : la libération de la Palestine. En fait, la pièce montre le conflit interpalestinien, voire la discorde, entre les partis Hamas et le Fatah (le premier radical et le second plus modéré), à travers une dispute qui éclate entre les militants. Les régimes arabes n'ont également pas été épargnés, puisque les gouvernants arabes sont décrits dans un état de passivité, voire de somnolence. Et leur léthargie arrange Israël. La pièce est ponctuée par l'entrée en scène d'un médiateur israélien, caricaturé à outrance. À un moment, un des militants palestiniens dit une phrase très grave, qui fait référence au massacre des juifs par les nazis : “Avez-vous dansé avec les Allemands ?” Cette phrase est choquante dans la mesure où elle ne fait pas la différence entre le régime nazi hitlérien et les Allemands eux-mêmes, en tant que peuple. D'autre part, et bien que la cause que défend la pièce soit très noble, Laou kounta falastiniyane, politisée à l'extrême, frôle la vraisemblance et frise le ridicule dans certaines scènes. En fait, la pièce est passée par beaucoup de moments difficiles et le propos s'est retrouvé éparpillé et dilué : à l'exemple des comédiens qui haussaient le ton sans que le jeu ne suive. Et la langue arabe classique qui n'a nullement arrangé les choses, causant ainsi un sur-jeu. Ajoutez à cela, le fait que l'espace n'a pas été bien géré, puisque les comédiens n'ont pas été correctement dispatchés sur scène et ont évolué dans le même mini-espace. Et on ne peut pas dire non plus que la scénographie était renversante, puisque dans un site archéologique, le téléphone était placé sur une pierre en plein air et un olivier au dessus, comme pour faire référence à la symbolique de cet arbre. Mais au lieu de susciter la réflexion, Laou kounta falastiniyane pose les questions et donne les réponses. Par ailleurs, on reconnaît au metteur en scène, Oussama Abbas Islam (qui a signé El Ghoutia, en 2007 pour le TNA), sa fidélité à lui-même et à sa vision, puisqu'il s'inscrit dans la subversion. Mais celle-ci est souvent utilisée à tort et à travers. La question étant : la subversion, pour quoi faire ? Et non la subversion pour déranger et déstabiliser le spectateur. Et puis, la caricature et l'humour ne sont pas des éléments déterminants dans une pièce qui développe un propos aussi sérieux et grave à la fois. En revanche, en comparaison avec El Ghoutia, Laou kounta falastiniyane est une pièce plus mûre et plus réfléchie. Mais le problème réside dans la pratique théâtrale en Algérie et les libertés. Le théâtre en Algérie se cherche encore et traite toujours des mêmes thématiques, des mêmes sujets et abonde beaucoup trop souvent dans le même sens… même lorsqu'il évoque la Palestine.