L'association culturelle At Qodhia du village Adrar, dans la commune d'Aghrib (à 45 km au nord-est de la ville de Tizi Ouzou), organise, à l'occasion de la célébration de la Fête nationale de l'indépendance et de la jeunesse, un colloque sur Ahmed Ouguenoune, un des animateurs, dans les années 1930/40, du mouvement national contre le colonialisme français. Ce militant activait en France, à Alger et dans sa région natale, Ath Jennad. L'objectif pour l'association est “d'exhumer” le nom de cet emblématique homme historique, principal organisateur, dit-on, de la manifestation du 1er mai 1945 à Alger pour revendiquer le droit des Algériens à l'autodétermination, comme le rapportent d'émérites historiens dans leurs divers livres, tels que Hocine Aït Ahmed, Benjamin Stora, historien français, ou feu Idir Aït Amrane. Depuis 1936, rapporte-t-on, Ahmed Ouguenoune était adhérent de l'Etoile nord-africaine (ENA) à Paris. Ouvrier dans ce pays et ayant épousé une Française, Ahmed Ouguenoune, autodidacte de formation, y militera encore dans les rangs du Parti du peuple algérien (PPA), avant de retourner en Algérie à la fin des années 1930 et aux débuts des années 1940. Né en 1904, Ahmed Ouguenoune est décédé en 1945 des suites des tortures subies. “Pendant la Seconde Guerre mondiale, Ahmed Ouguenoune transforma son café à la rue Boutin, au cœur de la Casbah d'Alger – à proximité de la mosquée Ketchaoua, ndlr – en lieu de rendez-vous des militants nationalistes. Incarcéré moult fois pour ses activités politiques, il entonnait souvent "Fi Serkadji" (à la prison de Barberousse), une sorte de complainte de bagnards égrenant les souvenirs de ses passages dans les cachots coloniaux français. Principal organisateur de la manifestation du 1er mai 1945, à Alger, Ahmed Oueguenoune sera arrêté et atrocement torturé pendant trois semaines, avant de le ramener, mourant, à son épouse. La rue Boutin, cela signifie la petite boutique d'Ahmed Ouguenoune (…). Ce petit commerçant tient sa ruelle, et sans doute tout le quartier, sous son contrôle politique. C'est à son contact que nous découvrirons peu à peu l'histoire du PPA, notamment à travers les récits de ses détentions (…)”, dira de lui encore Hocine Aït Ahmed (Mémoires d'un combattant, pp. 29-30). Idir Aït Amrane écrit, dans son ouvrage Ekker a-mmis u-mazigh, pp. 31-32 : “(…) Il était (Ahmed Ouguenoune) très généreux, et chaque fois que nous allions chez lui (rue Boutin), le café était gratuit ! Avec Si Omar, Laïmèche, Ould Hamouda, Aït Ahmed et Si Ouali (Benaï), nous passions de longues heures à commenter les évènements et à discuter politique, histoire et linguistique. (…) Lorsque je tombais malade, victime d'une hémoptysie, cet homme au cœur compatissant m'envoya un billet de 1 000 francs pour m'acheter des ampoules de calcium injectables. Lorsque je suis revenu quelques mois après pour les lui restituer, on m'annonça qu'il était décédé. Il avait été arrêté par la police au cours de l'été. Soumis à la torture, sa santé fragile n'avait pas résisté.” Enfin, dans le contexte de cet hommage, sept associations activant dans la région des Ath Jennad ont convenu, avec le président de l'APC d'Aghrib, du programme de déroulement de cette activité qui se tiendra respectivement à la maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou les 1er et 2 juillet, à Alger le 3 juillet et, les 5, 6 et 7 du même mois, au village natal du martyr, et à Aghrib, chef-lieu de la commune. Dans ce contexte, un cross national est prévu sur le circuit de la localité de Fréha, commune voisine. Celui-ci rassemblera des athlètes scolaires, ceux de la DJS, ainsi que des sportifs amateurs de la région. Par ailleurs, l'association prévoit de projeter un film documentaire qu'elle a réalisé récemment avec des témoins encore en vie, rescapés de la bataille du 22 octobre 1959 au lieudit Tachivount, théâtre de l'opération situé entre les villages Aghrib et Tala Tegana. À signaler que Benjamin Stora a reçu, fin avril dernier, le président de l'association At Qodhia, Boussad Aggoun, et des membres de la famille d'Ahmed Ouguenoune, après avoir donné une conférence au Centre culturel français à Alger. Il y a promis alors à ses hôtes qu'il reviendrait en 2010, vers la même période, pour animer des conférences dans d'importants centres urbains en Algérie, notamment en Kabylie. Il se serait engagé, selon notre interlocuteur, d'apporter ce dont il dispose comme “modeste” contribution pour l'histoire de la Révolution algérienne.