Washington offrait 5 millions de dollars pour la capture du numéro un du terrorisme au Pakistan, mort ou vif. Chose faite, mais les radicaux pakistanais ne s'avouent pas vaincus. Baïtullah Mehsud, l'ennemi numéro un des autorités pakistanaises et américaines, serait mort et même déjà enterré. L'information est d'abord venue de trois agents du renseignement pakistanais présents dans le Sud-Waziristan, l'antre des talibans pakistanais. Une information ensuite relayée par le ministre pakistanais des Affaires étrangères, puis par le ministre de l'Intérieur lui-même. Rehman Malik qui, sur l'ensemble des télévisions pakistanaises, parlait toutefois de très fortes probabilités sans avoir encore de preuve matérielle pour les confirmer. Chose faite hier. Mehsud a été tué mercredi dernier par un missile américain tiré d'un drone sur la maison de l'un de ses beaux-frères. Sa deuxième femme est également morte dans l'attaque. Frontalière avec l'Afghanistan, la région du Sud-Waziristan est très reculée, difficile d'accès mais surtout entièrement acquise à l'idéologie talibane. D'ailleurs, c'est de là qu'était parti, il y a à peine trois mois, le mouvement des radicaux jusqu'à parvenir aux portes d'Islamabad ! Cible prioritaire de l'offensive, dans les zones tribales du nord-ouest, lancée en juin dernier, Baïtullah Mehsud était déjà la bête noire du précédent gouvernement pakistanais. C'est à lui que l'ancien président, Pervez Musharaff, avait attribué l'assassinat de Benazir Bhutto, en décembre 2007. L'année où justement Baïtullah Mehsud a été désigné ou s'était autoproclamé chef du terik-é-taliban Pakistan, les talibans pakistanais du Sud-Waziristan. De 6 000 hommes, la tribu des Mehsud au Waziristan aurait depuis atteint, avec lui, 20 000 combattants, selon des sources sécuritaires pakistanaises. Âgé d'environ 35 ans, ce chef de guerre était aux côtés des talibans afghans au milieu des années 90. Pour les Etats-Unis, qui ont offert 5 millions de dollars pour sa capture, mort ou vif, il est alors devenu le principal relais d'Al-Qaïda au Pakistan. Accusé d'être encore le principal commanditaire de l'attentat de l'hôtel Mariott qui a fait 60 morts en septembre 2008, Baïtullah Mehsud a revendiqué depuis l'attaque d'une école de police en mars dernier. La région est une poudrière. De nombreux talibans afghans, chassés du pouvoir à Kaboul, fin 2001, par une coalition internationale emmenée par les Etats-Unis, se sont réfugiés dans les zones tribales pakistanaises en compagnie de leurs alliés étrangers d'Al-Qaïda, insufflant un nouveau souffle aux radicaux pakistanais. L'armée pakistanaise a fini par les combattre sérieusement après de sérieuses mises en garde de Washington, qui estimait qu'Al-Qaïda et les talibans afghans, épaulés par leurs alliés des tribus pakistanaises, ont reconstitué leurs forces dans les zones tribales, d'où ils intensifient leurs attaques contre les troupes internationales en Afghanistan. Le Pakistan, allié-clé des Etats-Unis, paye un lourd tribut à leur guerre contre le terrorisme : outre le millier de soldats tués dans les zones tribales depuis 2002, plus d'un millier de civils ont péri en un peu plus d'un an dans tout le pays, dans une vague sans précédent d'attentats, suicides pour la plupart. D. B.