Les producteurs qui n'avaient pas consenti de contrat avec l'Office ont eu la seconde alternative de fournir leur raisin aux opérateurs privés ayant ouvert des caves à Hadjadj, Sidi Lakhdar et Khadra. “Fuyant” les grandes difficultés de trouver et réunir la main d'œuvre daignant s'acquitter de la pénible tâche de la récolte du raisin durant le mois du jeûne, viticulteurs et opérateurs versés dans la transformation de ce dernier, ont consenti à anticiper les vendanges de la campagne agricole courante. Ainsi, s'est-on attelé à achever, au plus vite, la récolte. Entamées une semaine avant l'avènement du mois sacré, les vendanges ont, à peine, tenu une dizaine de jours. Et sans la frénésie qui les accompagnait habituellement, a-t-on constaté cette année. À la grande satisfaction des viticulteurs, qu'on n'a pas entendu se plaindre, ni rechigner à propos de moult malentendus avec les organismes acheteurs de leur produit, la production de raisin de cuve, tout comme le déroulement des vendanges, aurait été bonne, selon le directeur des services agricoles de la wilaya. Un satisfecit qui tient aux mesures exceptionnellement initiées par l'ONCV (Office national de commercialisation des produits vitivinicoles), qui a dû louer au moins cinq caves, à la coopérative viticole de la wilaya, pour prendre en charge la totalité de la production offerte par quelque 1 500 viticulteurs, avec lesquels a été conclu un contrat de livraison et auxquels des soutiens financiers à hauteur de 10 000 dinars par hectare avaient été consentis. Les producteurs, qui n'avaient pas consenti un contrat avec l'office, ont eu la seconde alternative de fournir leur raisin aux opérateurs privés ayant ouvert des caves à Hadjadj, Sidi Lakhdar et Khadra. De par l'hypocrisie qui entache le développement ou l'abandon du créneau de la viticulture, des vendanges rimant avec la fête d'autrefois, il n'en reste plus que le nom. La durée de la campagne a été réduite à tout juste une semaine. Une semaine en journées discontinues. La crasse caractéristique qui engluait les chaussées limitrophes sur des dizaines, voire des centaines de mètres, se limite aux abords immédiats de la cave. L'odeur, également caractéristique, n'embaume plus la localité comme autrefois. Même les ribambelles d'enfants et de bambins qui harcelaient remorques et alentours des caves, en jouant à cache-cache avec les livreurs du produit agricole, semblent avoir perdu le goût du jeu et de l'amusement. À la faveur d'un privilège particulier accordé à la wilaya au vu de l'état de dégradation de son aire cultivable, au lendemain de l'arrachage massif, mais surtout non réfléchi de son vignoble, subventions et soutiens particuliers des différents fonds ont commencé à “pleuvoir”, depuis le début des années 1990, sur Mostaganem afin de réhabiliter le vignoble “détruit”. Nonobstant le tabou pesant sur cette spéculation végétale, l'objectif d'une telle ambition était double : économique et surtout écologique. Des sociétés de production de plants de vigne et autres prestations de services nécessaires à cette culture ont ‘'essaimé''. Pour conforter son autonomie, l'Office national de commercialisation des produits vitivinicoles (ONCV) s'est même converti à la viticulture en plantant, à coup d'un immense effort technique et financier, plus de 600 hectares de vigne à travers la wilaya de Mostaganem. Au niveau du plateau de Mostaganem, zone ancestrale mais abusivement réputée pour l'abondance de l'eau d'irrigation, l'effort de l'Etat buta sur la réticence des agriculteurs. Aucunement soucieux de l'état de la nappe phréatique, la course effrénée vers les cultures spéculatives, à l'instar des pastèques et du maraîchage, s'enclenche au lendemain de la restructuration du secteur autogéré en 1988. L'échec est quasiment consommé. Au-delà du Cheliff, dans la région du Dahra en l'occurrence, l'eau, plus rare, imposait des ambitions plus mesurées. La sobriété héritée favorisa les cultures rustiques, notamment la vigne. Timidement au départ, en raison des appréhensions multiples dont elle était victime, la viticulture reconquit, à un rythme appréciable, son espace naturel, là où pratiquement toutes les autres espèces donnent de piètres rendements. La cadence de développement ne tarda pas à inciter le wali de l'époque à détourner le programme initialement destiné à la région du plateau au profit des fellahs du Dahra. Au début de l'année 2000, certains représentants de groupements de producteurs ont commencé à attirer l'attention sur le problème des caves appelées à recevoir la production des “vastes superficies nouvellement plantées qui ne cessaient de croître”. Incohérent, le développement recherché et induit par les pouvoirs publics manquera de l'harmonie requise. Nombre de facteurs et d'éléments indispensables n'évolueront pas dans le bon sens. Les résultats sont évidents sur le terrain. L'économie de marché a été “décrétée”. Le sauve-qui-peut a été érigé en règle économique, le vice et la ruse dominent l'art mercantile. Au bout du compte, bien malin serait celui qui s'en tirerait sans encombre. Dix ans après, la réticence à l'égard de la réhabilitation du vignoble demeure tout aussi vivace, et à tous les niveaux. M. O. T.