Dimanche, 23 août. C'est le deuxième jour du Ramadhan. La journée est chaude et humide. Nous sommes dans la station des bus menant vers le littoral est de Béjaïa. Les bus attendent désespérément les passagers qui se font désirer. Il est midi tapante. Nous prenons un bus à destination de Tichy. L'autocar démarre avec beaucoup de renflement de moteur et à bord… trois passagers ! “Oui, c'est trop calme. Notre chiffre d'affaires s'est divisé par dix. Le manque à gagner est terrible !” confie le propriétaire du bus. La circulation est fluide. Tout au long du trajet, on aperçoit une belle bande côtière longeant la baie de Tichy. C'est le calme plat. Les plages sont désertes. Nous sommes loin des pics de fréquentation de juillet et début août. Nous arrivons à Tichy au bout de vingt minutes de trajet. Hormis quelques commerces d'alimentation générale et un point de vente de téléphonie mobile, le village touristique est quasiment vide. Direction la plage. C'est le désert ! Des immondices jonchent le sable. La mer est calme. Les petites tentes alignées tout au long de la rive sont vides. Seul un couple d'émigrés est installé sous un parasol. “On profite des derniers jours de vacances”, dit Raïd, 38 ans. “C'est la première fois que nous visitons Béjaïa. Nous avons déjà fait pas mal d'endroits : Gouraya, pic des Singes, cap Carbon, Les Aïgades”, le paraphrase sa femme réjouie. À Souk El-Thenine, Tayeb, enseignant, et sa femme venaient de clôturer leur séjour en camping. “Nous sommes venus pour passer une semaine. Nous y sommes restés 10 jours. C'est agréable. Nous étions très bien pris en charge”, dit Tayeb. À Souk El-Thenine, les familles trouvent des hébergements bon marché. Seule carence : pas d'activités pour les enfants. “Les émigrés étaient beaucoup moins nombreux à venir cette année. Moi qui suis régulièrement l'actualité en France, à travers les chaînes françaises, je comprends pourquoi : c'est la crise”, explique un employé du complexe touristique les Hammadides. La fréquentation en a pâtit. La coïncidence du mois sacré de Ramadhan a un effet de ralentissement sur l'arrivée et les réservations de la clientèle nationale. Il a même un effet dissuasif sur les arrivées des émigrés. “Nous fondons un petit espoir sur la première quinzaine du mois de septembre. Nous avons souffert de la désertion des émigrés mais nous résistons”, explique le gérant d'un hôtel à Tichy. À noter, cette année, la concurrence de plus en plus acharnée des appartements meublés. L'offre en matière de logements informels ne cesse de croître à Béjaïa. Une offre qui suscite beaucoup d'intérêt auprès des estivants qui préfèrent la formule du meublé à celle jugée contraignante de la chambre d'hôtel. Les prix ont chuté de moitié en ce début de Ramadhan. “J'ai pour vous un F3 meublé, un superbe étage de villa, les pieds dans l'eau, à 25 000 dinars la semaine. C'est à moitié prix qu'avant le Ramadhan”, nous propose un particulier à Tichy. Un restaurateur rencontré dans la soirée s'est dit “bien placé pour constater que la conjoncture a bel et bien rendu beaucoup plus économes les Algériens pendant les vacances”. “Le contexte actuel accentue la baisse du pouvoir d'achat des vacanciers, notamment la clientèle émigrée”, constate-t-il. Cette saison, une bonne partie des professionnels du tourisme devraient limiter la casse. “Il y a une légère diminution de la fréquentation”, explique un autre gérant d'hôtel. Constat partagé par même les établissements qui ont connu un bon taux de remplissage. Au complexe touristique Melbou, on confie que “le mois de juillet s'est très bien passé”. Une tendance maintenue durant la première quinzaine du mois d'août. En revanche, la situation est très contrastée chez les restaurateurs. Un constat pour cette saison : les clients dépensent de moins en moins pour la nourriture. À mi-saison, l'été 2009 ne s'était pas avéré comme un cru d'exception, tout au contraire. Selon les plagistes et les hôteliers, la saison a démarré timidement en juin avec une chute des nuitées de 20 à 30% par rapport à la même période de l'année dernière. Pour le mois de juillet, les hôteliers se disent “avoir limité la casse”. Si certains estiment que l'essentiel a été préservé, d'autres, par contre, déclarent une saison en demi-teinte. En effet, seuls les hôtels de catégorie modeste ont réussi à tirer leur épingle du jeu. Le secteur a connu un glissement notoire en matière de clientèle qui, au lieu de se priver de vacances, a préféré opter pour des prestations moins chères.