C'est sur les airs de Qassaman et de Min Djibalina que des dizaines de personnes se sont rassemblées sur le pont Saint-Michel, tout près de la préfecture de police où officiait le préfet Maurice Papon de sinistre mémoire. De nombreuses associations ont appelé à cette manifestation commémorant la mort de dizaines d'Algériens assassinés par la police, alors qu'ils se rendaient à une manifestation pacifique. La Fédération de France du FLN entendait protester contre la décision raciste d'imposer un couvre-feu aux Algériens alors que les lueurs de l'Indépendance commençaient à poindre après une longue nuit coloniale. Par dizaines de milliers, les émigrés avaient répondu à son appel. Ils déferlaient de toutes les banlieues ouvrières de Paris. “Ils étaient en habit de fête”, a rappelé Mehdi Lalaoui, écrivain, réalisateur, qui se bat pour la reconnaissance du “crime” par l'Etat français. Son père était dans le cortège des manifestants. Il a survécu à la répression. En hommage, M. Lalaoui a réalisé le documentaire le Silence du fleuve (1991), dans lequel s'expriment des protagonistes de l'époque. Le fleuve, c'est bien sûr, la Seine dans laquelle ont été précipités des dizaines d'Algériens par la police de Papon. Sur le pont Saint-Michel, une plaque commémorative rappelle cette héroïque page de l'histoire de l'Indépendance. Symboliquement, ce sont des fleurs qui sont jetées dans la Seine par les manifestants. Cette fois, ils ont été plus nombreux que jamais. Le tragique événement est commémoré depuis 2003. Par des militants de gauche. Mais aussi par tous les Maghrébins. Un immense drapeau associant ceux de l'Algérie, du Maroc et de la RASD a été déployé.