Dans le cadre du Salon international du livre d'Alger, la journée d'hier a été consacrée à la Palestine, à travers deux conférences. La première a porté sur la littérature palestinienne du dedans. Dans l'après-midi, la salle El-Qods (chapiteau Sila), a abrité une conférence portant sur la réalité et les perspectives de la Palestine, dans un contexte démesurément violent. Cette conférence modérée par le journaliste et essayiste Hocine Belalloufi a été animée par l'Italienne Paola Caridi, l'universitaire belge Sébastien Boussois, le journaliste palestinien Hassan Balawi et l'essayiste et journaliste (Monde Diplomatique) Alain Gresh. Au premier abord, l'intitulé de cette conférence semble générique et très flou, dans la mesure où le conflit palestinien représente un enchevêtrement de plusieurs causes. Comment donc aborder ce conflit inextinguible sans donner l'impression d'être ronronnant ou récurrent. Les quatre intervenants ont tout de même réussi à s'organiser à trouver des grilles de lecture et des axes de réflexion, notamment la description de la discorde existant au sein du mouvement palestinien, la colonisation israélienne et ses instruments, et la définition des véritables ambitions d'Israël. Alors que Hassan Balawi pense que “le conflit à nos yeux n'est pas un conflit religieux, mais plutôt politique et national”, Paola Caridi a considéré que “la mosquée Al-Aqsa est considérée comme une ligne rouge, et pas uniquement politique et religieuse.” Mme Caridi ajoute : “Il y a une situation de colère dans la rue palestinienne, et ceci est dû à l'absence de réaction politique et à la fracture entre les deux forces (Fatah et Hamas, ndlr).” Pour elle, Jérusalem transcende toutes ces divergences d'opinion, tout en remarquant qu'aujourd'hui, les jeunes s'impliquent dans la défense de Jérusalem en utilisant des moyens non violents. Sébastien Boussois a développé dans son intervention les formes et les instruments d'Israël dans sa politique d'expansion. Pour ce faire, il a remonté au plan des Nations unies de 1947 qui considérait Jérusalem et les Lieux saints comme étant des zones internationales. Selon lui, “la colonisation s'est faite par cercles”. Et après avoir eu le contrôle sur une grande partie de Jérusalem, il a été question pour Israël de coloniser la vieille ville et de contrôler les voies. “Cette politique de judaïsation de la vieille ville a pris une tournure spectaculaire, avec la destruction d'un grand nombre de maisons palestiniennes”, affirme-t-il. Poursuivant son processus de radicalisation permanente avec le mur de Jérusalem qui a rendu la situation encore plus délicate, causant ainsi des pertes multiples, notamment des emplois. Pour sa part, Alain Gresh a développé la question des ambitions d'Israël, mais “pour répondre à cette question, il faut se placer un peu en amont”, déclare-t-il d'emblée. Il expliquera également que pour réfléchir sur le cas de la Palestine, il faut prendre en exemple le cas de la colonisation et ses multiples formes. Selon lui, il y a deux schémas du colonialisme : de contrôle et de peuplement. “Lorsqu'on regarde le cas de peuplement, on constate qu'il y a deux cas de figure : il y a la colonisation réussie, comme en Amérique du Nord, Australie et Nouvelle- Zélande ; et il y a le cas où les colons ne suffisent pas pour remplacer la population locale, par exemple l'Algérie ou l'Afrique australe”, a-t-il schématisé. Mais le cas de la Palestine se dresse comme un cas à part selon lui, “car la colonisation sioniste n'a pas réussi à remplacer les populations locales.” Quant aux solutions, elles ne sont pas très nombreuses et encore moins avantageuses pour les Palestiniens, puisque “la crise entre le Fatah et le Hamas prive les Palestiniens d'une arme très importante, et puis je ne crois pas qu'il y ait une communauté internationale : il y a les Etats-Unis et l'Union européenne.” La solution des deux Etats semble bien lointaine. “La solution des deux Etats est très difficile à mettre en œuvre dans ce régime d'apartheid, où les perspectives sont difficiles à formuler en l'absence de perspectives politiques”, conclut-il. Alain Gresh a tout de même rappelé que des mouvements de solidarité se développent de par le monde avec le peuple palestinien. Car “pour tous ceux qui se réclament de l'humanisme”, ce qui se passe en Palestine va à l'encontre de tous les droits humains.