L'information relayée de quartier en quartier a fait le tour de la ville en un rien de temps comme une traînée de poudre. Et quelle information : le déplacement pour assister au match de Khartoum serait pris en charge totalement par la compagnie nationale, Air algérie moyennant seulement la modique somme de 3 000 DA. Ni une ni deux, alors que la ville d'Oran s'était réveillée le matin assommée et sous le choc, voilà que les inconditionnels des verts reprennent des couleurs et repartent de plus belle avec leurs slogans fétiche et cette assurance de ceux qui ne veulent et ne peuvent imaginer, rien d'autre, que la victoire… En quelques heures, l'agence d'Air Algérie sur le front-de-mer devient le point de ralliement de centaines de supporters jeunes, moins jeunes, hommes, femmes, sans distinction, tous brandissant qui un passeport, qui une carte d'identité aux cris : “Au Soudan gratuitement”. La rumeur a fait son œuvre et certains assurent qu'ils n'auront qu'à payer cette somme, même sans passeport, pour être à Khartoum mercredi. S'agglutinant à la devanture de l'agence, débordant sur la chaussée du boulevard du front-de-mer, c'est une foule qui ne cesse de grossir au fil des minutes dépassant le profil habituel des habitués des stades et des matchs de football. Les cortèges de voitures klaxonnant à tout-va, recouvertes de drapeaux et de posters du onze national réapparaissent également, provoquant en quelques heures un embouteillage monstre. Des policiers de la sûreté urbaine du 7e arrondissement qui se trouve à côté pointent le nez et tentent de raisonner les jeunes leur demandant de se discipliner. Mais leur voix est couverte par les “mazal mazal, mazal essah y ben !… Jaïch Châab mâak ya Saâdane”. À l'intérieur de l'agence, les employés au nombre de 5 sont pris d'assaut, le comptoir ne résistent pas devant la poussée des jeunes qui crient, se bousculent, jouent des coudes pour tenter de tendre leur passeport. La directrice de l'agence d'Air Algérie, calme mais dépitée, n'arrive plus à se faire entendre avec ses collègues qui ont dû reculer devant le nombre des candidats au départ pour le Soudan. Interrogée sur ces informations ou rumeurs de la gratuité du voyage, notre interlocutrice ne sait quoi dire. “Je ne sais pas d'où ils ont entendu cela, nous n'avons reçu comme seule instruction d'enregistrer les noms de ceux qui veulent partir avec leur numéro de téléphone, sans plus. La décision d'organiser des vols spéciaux, charters ou autres mais avec des réductions, n'a pas été encore prise”. Quoi qu'il en soit, des vols directs sur Khartoum devraient bien avoir lieu à partir d'Oran, il serait question de faire des réductions de tarifs de l'ordre de 30 ou 20% avec la gratuité du visa et peut être même du billet d'accès au stade. Des agences de voyages ont dès le matin délivrées pour leur part des billets tout compris pour 35 000 DA, mais là aussi l'on s'achemine vers des réductions. À l'extérieur la foule est toujours aussi importante, un groupe de jeunes adolescents appellent leur mère et la supplient de leur donner de l'argent pour “partir à Khartoum…” d'autres se promettent de se débrouiller l'argent. Tous veulent être de la partie et se jurent que cette fois-ci, les Algériens ne se feront plus caillassés et que la revanche sera bien là.