Dans la nuit de vendredi à samedi derniers, un groupe terroriste, d'une vingtaine d'éléments armés, a mené une incursion dans un hôtel à Cap Sigli, situé à l'entrée est du village Tiziouar, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest du chef-lieu de la wilaya de Béjaïa. Hier, vers les coups de 14h30, la Renault Scénic du chauffeur de taxi qui nous conduit vers les lieux s'arrête devant l'entrée principale du bar-restaurant Cap-Sigli, implanté sur la RN 24 reliant Béjaïa et Azzefoun. Dès notre arrivée, un jeune de 25 ans, visiblement perturbé, nous accueille devant le portail de l'établissement, se présentant comme étant le fils du propriétaire et ce, après s'être assuré de notre identité. Mis à part deux clients, attablés sur la terrasse de la cafétéria surplombant la grande bleue, les autres salles étaient complètement vides. Sollicité par nos soins pour nous raconter ce qui s'est réellement passé en cette nuit de vendredi à samedi, le jeune Farid, fils du tenancier de ce bar-restaurant, nous affirme qu'un groupe terroriste, armé de kalachnikovs et de talkies-walkies, est passé par là. “J'étais au sous-sol, au bar-restaurant, en train de servir des clients, lorsque l'un de nos employés m'alerta de cette incursion. Pour réussir leur coup, les terroristes se sont fait passer pour des militaires et avaient avec eux un jeune citoyen du village qu'ils ont ramené de force comme un compagnon. C'est ainsi qu'ils sont parvenus à entrer en bernant mon père qui leur a ouvert la porte”, relate ce jeune barman, toujours sous le choc de cette nuit cauchemardesque. Selon lui, les terroristes se sont scindés en deux groupes. L'un d'eux, composé d'éléments en uniformes de l'ANP, avait pour mission de faire irruption dans le bar, tandis que l'autre, comptant des individus barbus et en tenue afghane, était embusqué dehors. Les assaillants, qui ont brutalement investi le restaurant situé au sous-sol, ont d'abord procédé à la vérification de l'identité de l'ensemble des personnes s'y trouvant, tout en les rassurant qu'ils ne sont pas contre les citoyens civils. “Nous sommes des moudjahidine du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) de Hassan Hattab. Nous combattons l'arbitraire, l'injustice et les impies. Nos ennemis sont les tenants du pouvoir mécréant (taghout) et ses serviteurs”, ont-ils fait savoir aux citoyens présents dans la salle. Ces derniers auront droit, ensuite, à un long discours moralisateur, prononcé par l'“émir” du groupe qui exhortera ses auditeurs à renoncer aux péchés, tels que l'alcool et à suivre la voie de la sagesse préconisée par la religion musulmane. Au cours de ce prêche, le gérant de l'établissement est sommé de ne plus commercialiser ou de servir de boissons alcoolisées. Après ce sermon, les sbires de Hassan Hattab procéderont au saccage de tous les objets se trouvant sur leur passage. Des tables, des chaises des caisses d'emballage, des bouteilles vides et pleines, des vitres, un jeu électronique de 80 millions de centimes, un poste-cassette, le comptoir, le présentoir… ont été dévastés. Les terroristes ont pris tout leur temps pour accomplir leur forfait et n'avaient, à aucun moment, redouté quoi que ce soit. Bien au contraire, ils étaient sereins et imperturbables, témoigne notre interlocuteur. Celui-ci précise également que ces islamistes armés se sont emparés de toutes les denrées alimentaires se trouvant à l'intérieur de la salle de cuisine et ont délesté tous les clients de leur argent de poche. “La recette de cette soirée, qui s'élève à quelque 50 000 dinars, a été aussi subtilisée”. Les terroristes quitteront l'établissement vers 23 heures, en dérobant les véhicules personnels du gérant et d'un client. Ils dresseront ensuite un faux barrage sur la RN 24 pour délester un routier de son fourgon, avant de prendre la fuite en empruntant le chemin de wilaya menant vers Adekar. Vers 1 heure du matin, les éléments de la brigade de gendarmerie de Béni Ksila interviennent sur les lieux et ce, après avoir été informés par un client riverain. Mais en vain. Les véhicules dérobés seront retrouvés, le lendemain, au lieu-dit Tameyalt, à mi-chemin de Djebla, chef-lieu de la commune de Béni Ksila. Le commandant du groupement de gendarmerie de la wilaya de Béjaïa, le colonel Sabri, que nous avons contacté hier, à ce sujet, nous fera savoir que suite à cette incursion, des mesures de sécurité ont été prises. “Nous avons renforcé l'effectif de la brigade de Béni Ksila pour parer aux aléas de la conjoncture. Nos éléments ne manqueront pas de mener des patrouilles nocturnes et des embuscades visant à traquer ces terroristes”, nous confie-t-il. K. O.