En initiant, pour des raisons purement politiciennes et électoralistes, un débat national sur l'identité insidieusement associée à l'immigration, elle-même associée à l'insécurité, il ne pouvait pas ignorer qu'il ouvrait la boîte de Pandore. “La régularisation par le travail” au profit des sans-papiers vivant en France pourrait n'être plus qu'un rêve du passé, le ministre français du Travail, Xavier Darcos, ayant menacé d'ordonner la fermeture des employeurs indélicats. Les premiers concernés, les intérimaires sans papiers, n'entendent pas se laisser faire et font grève depuis six semaines, encadrés par une douzaine d'organisations et d'associations. Il n'en fallait pas plus pour emballer la classe politique qui s'est saisie du débat. La Première secrétaire du PS a demandé au gouvernement une régularisation des sans-papiers justifiant d'un travail. Le président Sarkozy a répliqué aussitôt, à l'occasion d'une visite de terrain en banlieue parisienne. “Tant que je serai président de la République, il n'y aura pas de régularisation massive de sans-papiers”, a-t-il martelé, craignant qu'une telle décision agisse comme un appel d'air pour de nouveaux immigrés clandestins. Autre sujet qui fait débat : ces dernières années, le nombre de gardes à vue a considérablement augmenté et certaines d'entre elles ont mal tourné et ont donné lieu à de graves bavures. Les interprétations du phénomène sont multiples. Si pour certains, il s'agit très souvent du zèle de la police qui abuse de la garde à vue, pour d'autres, c'est la preuve que l'insécurité augmente, ou encore que la force publique est plus présente sur le terrain. Une chose est pourtant sûre : dans bien des cas, les méthodes mises en œuvre par les agents de police ne font pas l'unanimité, comme en atteste le témoignage du Franco-Marocain Anyss Arbib, étudiant en quatrième année à Sciences Po, qui a assisté à des violences et à des propos racistes de la police à l'égard des Franco-Maghrébins sortis fêter la qualification de l'équipe algérienne de football à la Coupe du monde, manifestation de joie dont a profité une bande d'énergumènes pour s'adonner à son sport favori, la casse. Lui-même a été violenté et insulté par un policier, alors qu'il était en voiture avec un ami et qu'on ne pouvait leur reprocher aucune infraction. “Dégage, sale arabe !” lui a lancé un policier à la figure, insulte dont le quotidien Libération a fait sa une de mardi pour rapporter son témoignage, qui fait état d'inadmissibles dépassements des agents de l'ordre. Là aussi, des politiques ont réagi. L'ancien Premier ministre Dominique de Villepin a écrit au "sale arabe" pour le soutenir, et l'actuel ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, le transfuge du Parti socialiste, Eric Besson, cherche à le rencontrer, sans qu'il en explique les motivations. C'est que M. Besson n'ignore pas qu'il est d'une certaine façon responsable de cette dérive policière, en particulier, et de la recrudescence du racisme antimaghrébin, en général. En initiant, pour des raisons purement politiciennes et électoralistes, un débat national sur l'identité insidieusement associée à l'immigration, elle-même associée à l'insécurité, il ne pouvait pas ignorer qu'il ouvrait la boîte de Pandore. L'utilité et l'opportunité d'un tel débat ne font pas l'unanimité au sein de la classe politique française, loin s'en faut. Par contre, Jean Marie Le Pen et sa fille Marine, qui s'apprête à lui succéder à la tête du Front national, se frottent les mains. Tandis que le vieux leader de l'extrême droite se gausse d'avoir eu raison avant tout le monde, sa fille est montée à l'assaut du “droit du sol” et a fustigé, par la même occasion, le principe de “la double nationalité”. Bien sûr, toute la droite bien-pensante, le président Sarkozy en premier, arguera qu'il s'agit d'isoler la droite extrémiste et raciste en entraînant une partie de son électorat. Quand bien même les résultats électoraux lui donnent raison, ce qui est loin d'être acquis, peut-on parler de l'isolement du Front national si la droite républicaine au pouvoir s'approprie et met en œuvre ses idées ?