Yahia Hadouche, ancien moudjahid et poète en langue amazighe, est né en 1926 à Ighil Ali (wilaya de Béjaïa) d'une famille de petits artisans. Parallèlement à sa lutte pour le pays, il écrit de la poésie. Dès 19 ans, il écrit sur l'amour et la Révolution algérienne. En 2004, avec l'aide de l'écrivain Tahar Ouettar, il édite son premier recueil de poème Ide averkane (la nuit noire), suivront ensuite Agroudj n'issefra (trésor de poèmes) et Avehri n'elghourba (la brise de la nostalgie), sorti en octobre dernier. Liberté : vous avez choisi la poésie parmi d'autres genres littéraires, comme la nouvelle, le roman ou le théâtre. Pourquoi et comment la poésie devient-elle un acte de résistance ? Yahia Hadouche : Ce n'est pas un choix, mais une coïncidence comme quelqu'un qui passe par un lieu peu connu et il y rencontre une âme sœur, dont le premier fruit est l'engagement pour une cause noble et légitime. Avec le temps, cette rencontre s'est muée en une mission historique qui oblige le poète à la réflexion et à l'engagement auprès des siens. J'ai fait la découverte de la poésie, surtout à travers l'écoute de la chanson amazigh, et, depuis, je n'ai cessé de m'y baigner. Rappelons que la poésie est une arme contre la mort, l'injustice et l'oubli. C'est aussi un vécu. La poésie est très peu lue. Où trouve alors le poète ses motivations pour écrire ? C'est surtout la quête de liberté, la volonté de briser les tabous et une révolte contre l'ordre établi. Pour ma part, j'ai publié mon premier recueil de poèmes il y a cinq ans. C'est en fait, une expérience de 59 ans de poésie, de 1945 à 2004, que j'ai couchée sur papier. En plus, j'essaie en toute modestie d'apporter quelque chose de plus à la poésie amazigh. Certains disent qu'écrire en langue tamazight est difficile. Que leur répondez-vous ? Effectivement, écrire en tamazight est une tâche difficile et même extraordinaire. La difficulté est double lorsqu'il s'agit de poésie. Cependant, il y a nécessité de passer à l'écrit pour ceux qui sont conscients des dangers qui guettent notre langue et notre culture ; donc, il faut avoir l'audace de conquérir un tel domaine. Que pensez-vous de la poésie amazighe actuelle ? Actuellement, la poésie amazigh se meurt sous les yeux même de ses nouveaux poètes. Les masses la considèrent comme une perte de temps ou des discours creux ; cette attitude vient de l'invasion des idées matérialistes qui ont atteint la société et la culture amazighes. Il y a également l'indifférence de l'intelligentsia amazigh dominée par les arrivistes. En outre, la poésie amazigh souffre de la marginalisation ! Mais il y a aussi de grands poètes jeunes et déterminés avec des idées, des mots et des objectifs nobles. Ils apportent beaucoup à la poésie amazigh.