Dans cet entretien, le premier responsable de l'Agence nationale du patrimoine minier aborde le potentiel de l'Algérie, les résultats du secteur depuis la mise en œuvre de la nouvelle loi minière. Il aborde également la question sensible de la protection de l'environnement. Quelle est l'importance du potentiel minier de l'Algérie ? Il faut considérer le potentiel minier en Algérie en trois parties distinctes. a. Le potentiel minier qui a été déjà mis en valeur et octroyé aux sociétés minières pour le mettre en exploitation. b. Le potentiel minier en cours de mise en évidence, et ce sont les titres miniers d'exploration en cours de validité qui permettront certainement de découvrir de nouveaux gisements à mettre en exploitation. c. Le potentiel minier qui est à découvrir, qui peut l'être grâce aux opérations de prospection qui ont été lancées par les adjudications. Parmi ses principales richesses, l'Algérie détient des réserves importantes de phosphates : 2 milliards de tonnes. Ferphos dispose de capacités de faire évoluer le volume de production, de dépasser le cap très faible actuel de 2 millions de tonnes/an. Elle peut atteindre une production de 20 millions de tonnes/an pour peu qu'une plateforme de transformation du phosphate lui soit octroyée (et figurer parmi les cinq premiers exportateurs mondiaux de phosphates). Nous avons un potentiel de plomb-zinc en cours de mise en valeur à Oued Amizour, dans la wilaya de Béjaïa. L'étude de pré-faisabilité réalisée par le partenaire Terramine (australien) a évalué le montant des investissements à plus de 250 millions de $ US. Concernant l'or, les réserves de Tirek-Amesmessa, situées dans le Hoggar, sont estimées entre 100 et 200 tonnes. On peut produire 3 tonnes d'or métal par an à partir de ces gisements. La production actuelle est de 1,1 tonne d'or métal. Il convient de noter que l'Algérie à travers cette activité est entrée dans le club des producteurs d'or. D'autres sites sont en cours d'exploration. Pour le sel, les réserves principalement dans les chotts sont énormes. Quant au marbre, le potentiel connu est très peu développé. Pour les agrégats, la production connaît une nette progression. On produisait en 2007,32 millions de mètres cubes. On est passé à 51 millions de mètres cubes d'agrégats en 2008. Le potentiel qui reste à découvrir offre des perspectives de mise au jour de gisements intéressants. Au Sud, dans le Hoggar, seulement 60 000 à 80 000 kilomètres carrés sont couverts par des études détaillées sur la présence de substances minérales. Nous allons faire des levées aéromagnétiques qui pourraient déceler des anomalies susceptibles d'indiquer la présence de réserves de substances minérales. Quels sont les résultats de l'ANPM depuis sa création en 20O5 et l'importance des investissements engagés dans le secteur ? Nous avons enregistré en 2008 des recettes de l'ordre de 3,6 milliards de dinars. Elles totalisent 8 milliards de dinars depuis 2000. À fin octobre 2009, l'ANPM a récolté 9,3 milliards de dinars à l'issue des adjudications. Depuis 2001, 2 219 titres miniers ont été attribués : 1 367 dans les calcaires, 132 dans les argiles, 250 pour les autres substances destinées à la construction. Ils se répartissent ainsi : 367 dans l'exploration, 309 dans la prospection et 1 808 concernent l'exploitation. À noter que l'ANPM lance quatre adjudications par an pour les substances minérales industrielles et deux adjudications par an pour les autres substances minérales. Les investissements qui ont été consentis totalement par l'Etat de 1962 à 2000 s'élèvent à près de 1,5 milliard de $, soit près de 200 millions de dollars par an. Actuellement, l'investissement réalisé dans le secteur, par le privé essentiellement, est passé de 51,43 millions de $ en 2007 à 68,9 millions de $ en 2008. Au total, depuis 2003, près de 200 millions de dollars ont été investis dans le secteur minier. Quant à la balance commerciale, l'Algérie a exporté pour 204 millions de dollars de produits miniers en 2008. Elle en a importé pour 380 millions de dollars Pouvez-vous présenter les grands chantiers de l'ANPM ? Premier chantier : on se prépare à faire face à la demande en agrégats en forte augmentation par suite du lancement du plan de relance important de réalisation des infrastructures (routes, barrages, etc.). On va renforcer l'offre en agrégats par le système d'adjudications. Second chantier : la promotion de sites miniers. Précisément, on prépare les sites à mettre en adjudication. On complète les données nécessaires pour le lancement des appels d'offres. À cet effet, une base de données sur le potentiel minier algérien sera opérationnelle en juillet 2010, au profit des investisseurs et des chercheurs. Troisième chantier : l'assainissement dans les titres miniers. L'ANPM enregistre une centaine de cas de sociétés qui n'ont pas respecté leurs obligations. L'ANPM pourrait leur retirer le titre minier. Quatrième chantier : renforcer la petite exploitation minière. C'est un chantier qui me tient particulièrement à cœur tant l'enjeu est d'une extrême importance. En 2010, l'ANPM compte appuyer les jeunes chômeurs à créer une activité d'exploitation (travail de la pierre par exemple) dans les zones montagneuses ou déshéritées, en vue de lutter contre le chômage. L'ANPM prend-elle en charge le volet environnemental de l'activité ? C'est l'ANGCM qui a la prérogative de contrôle des infractions en matière d'environnement. Lorsque l'ANPM constate des violations de la réglementation minière en matière de préservation de l'environnement dans l'exploration ou l'exploitation de sites miniers, elle les signale à l'ANGCM. Dans nos adjudications, on choisit, par ailleurs, des sites dans des zones où on ne touche pas aux forêts, aux ressources hydriques. Il faut préciser que la loi minière contrôle le sujet environnemental, et qu'à chaque demande de titre minier d'exploitation, nous exigeons une étude d'impact et un plan de gestion environnemental tel que le prévoit la réglementation. Votre dernier mot ? On est conscient de nos responsabilités et que notre activité peut être polluante. Toutefois, on est obligé de faire des sacrifices quand la nécessité l'oblige. Que serait le monde sans fer et aluminium pour fabriquer des voitures, sans phosphates pour produire des engrais, sans calcaire et argile pour le ciment, sans agrégats pour la construction de routes et de logements ?