Directement mis en cause par l'Onu, le chef de la junte guinéenne, le capitaine Moussa Dadis Camara, a été blanchi hier par une commission d'enquête mise en place par les autorités militaires guinéennes concernant le massacre d'opposants perpétré le 28 septembre 2009. Pour rompre avec l'impunité régnant dans ce pays d'Afrique de l'Ouest depuis plus d'un demi-siècle, une Ong guinéenne a appelé la Cour pénale internationale (CPI) à se saisir du dossier. La procureure adjointe de la CPI, Fatou Bensouda, est attendue le 15 février dans la capitale guinéenne, pour déterminer si les crimes commis le 28 septembre à Conakry, quand les forces de sécurité ont réprimé dans le sang un rassemblement de l'opposition (156 personnes tuées, selon l'Onu), relèvent de la compétence de la Cour. Dans ses conclusions, la commission guinéenne, boycottée par l'opposition, ne recommande des poursuites judiciaires qu'à l'encontre d'une personne nommément citée : l'ex-aide de camp du capitaine Camara, le lieutenant Aboubacar Chérif Diakité dit “Toumba”, en fuite depuis la tentative d'assassinat de son chef, le 3 décembre. Le président de la commission, le procureur Siriman Kouyaté, a fait valoir que le président Camara n'est jamais venu au stade où s'étaient déroulées les violences ! Cette commission nationale va à l'encontre de la commission d'enquête de l'Onu qui a pointé, en décembre, “une responsabilité pénale individuelle” du chef de la junte, de son ex-aide de camp, mais aussi du commandant Tiégboro Camara. En décembre, l'organisation Human Rights Watch avait aussi écrit, dans un rapport détaillé, qu'un faisceau de preuves laissent penser que Moussa Dadis Camara a joué un rôle central dans le massacre. Certains témoignages affirment que “Toumba” aurait agi sur ordre du capitaine Camara. Et “Toumba” a lui-même assuré avoir tenté d'assassiner son chef, actuellement en convalescence au Burkina Faso, parce que ce dernier voulait lui faire porter l'entière responsabilité des évènements du 28 septembre. Pour l'ONG qui a saisi la CPI, les autorités politiques, judiciaires et militaires ne sont pas prêtes à aller vers la manifestation de la vérité.