Les opposants réclament également la non-candidature du capitaine Camara et la dissolution du Conseil national pour la démocratie et le développement (junte). La junte au pouvoir en Guinée a menacé hier d'écarter les principaux opposants de la course à la prochaine élection présidentielle, théoriquement prévue le 31 janvier mais qui, selon la commission électorale, est «techniquement impossible» à tenir à cette date. Dans le même temps, les membres de la commission internationale d'enquête sur le massacre le 28 septembre à Conakry de plus de 150 opposants, selon l'ONU, devaient arriver hier en début de soirée dans la capitale guinéenne. «Tous ceux qui ont géré le pays, qui ont "goûté" au poste de Premier ministre ne peuvent être candidats (à la présidentielle) en Guinée», a déclaré à Ouagadougou, Idrissa Chérif, le ministre en charge de la Communication du chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara. «Le pays a été pillé, bradé par ces gens-là, on ne peut pas accepter ça. Ces personnes sont "poursuivables" sur le territoire guinéen parce qu'ayant géré et dilapidé les fonds publics», a-t-il insisté. «C'est la nouvelle Constitution que nous allons mettre en place qui dira qui peut être candidat (et) qui ne doit pas l'être. Mais on ne peut pas permettre à des gens qui ne sont pas propres de diriger encore notre pays», a indiqué à Ouagadougou le ministre. Il n'a cité aucun nom. Mais trois anciens Premiers ministres devenus leaders de l'opposition, Sidya Touré (juillet 1996-mars 1999), François Lonsény Fall (février 2004-avril 2004) et Cellou Dalein Diallo (décembre 2004-avril 2006), mem-bres des Forces vives (opposition, syndicats, société civile) s'opposent farouchement au maintien du capitaine Camara à la tête de la Guinée. Ils réclament également la non-candidature du capitaine Camara à la présidentielle et la dissolution du Conseil national pour la démocratie et le développement (Cndd, junte). M.Chérif s'exprimait quelques heures avant la remise des propositions de la junte au médiateur pour sortir la Guinée de la crise dans laquelle elle est plongée depuis la répression le 28 septembre d'une manifestation hostile à la probable candidature du chef de la junte à la présidentielle. Mais le premier tour de la présidentielle, qui reste théoriquement prévu le 31 janvier 2010, est «techniquement impossible à tenir» à cette date, a annoncé hier le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), Ben Sékou Sylla. A ce jour, «nous n'avons même pas fait la commande du matériel électoral, pas de liste des électeurs à cause de la suspension du financement par les bailleurs de fonds» à la suite du massacre du 28 septembre, a-t-il ajouté. Un report de la présidentielle pourrait donc être prochainement annoncé par le gouvernement mis en place par la junte. De toute façon, pour Mamadou Baadiko Bah, président de l'Union des forces démocratiques (UFD, opposition), «depuis les évènements du 28 septembre, il est pratiquement impossible d'envisager des élections libres et équitables» car «il n'y a aucun consensus national». «Nous refusons que les membres de la junte soient candidats à ces élections, que l'administration territoriale soit sous la coupe des militaires comme c'est le cas aujourd'hui», a poursuivi le responsable de l'opposition. C'est dans ce climat tendu que trois responsables de la commission d'enquête internationale Mohamed Bedjaoui, Françoise Kayiramirwa et Pramila Patten sont attendus à Conakry, où ils séjourneront jusqu'au 4 décembre. Selon de très nombreux témoignages, les forces de défense et de sécurité guinéennes, commandées par des officiers proches du chef de la junte, avaient mis en oeuvre une «violence inouïe» pour réprimer le rassemblement d'opposants.