Avec Mokri parmi les trois vice-présidents (en compagnie de Saïdi et Menasra) et Megharia à la tête du conseil consultatif, les “radicaux” ont, sans doute, pris le contrôle du parti. Bouguerra Soltani a été élu, hier, au petit matin, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP) en remplacement de Mahfoud Nahnah, décédé le 19 juin dernier. Sur les 205 membres du conseil consultatif, 105 lui ont accordé leurs voix, contre 95 à son concurrent Abderrahmane Saïdi. Auparavant, les membres du conseil étaient élus, chacun par ses pairs des wilayas, selon les quotas définis par le IIIe congrès. Les 1 200 délégués ont apporté des amendements aux statuts de leur parti, limitant par exemple l'éligibilité de l'instance consultative à une année de présence seulement au sein du bureau exécutif national et relevant le nombre de représentants à la même instance entre un et six par wilaya. Ils ont aussi réduit le taux de désignation à près d'un tiers afin de privilégier la qualité d'élu. Alors qu'il était majoritairement composé de membres désignés ou bénéficiant de la qualité de fondateurs, le conseil compte désormais 66% d'élus, ce qui lui donne, ainsi qu'au congrès, une large crédibilité. Bouguerra Soltani, soutenu par quelques durs comme Abderrazak Mokri, ancien chef du groupe parlementaire à l'Assemblée populaire nationale (APN), et Mohamed Megharia, qui a assuré l'intérim après le décès de Nahnah, avait un ascendant sur Abderrahmane Saïdi. Détenteur d'un magister en sciences islamiques et en lettres arabes (à l'université de Constantine), “Abou Djerra” est resté moralement numéro 2 et, depuis toujours, potentiellement héritier du trône. Agé de quarante-neuf ans, il a été président du conseil consultatif “aux heures de gloire, du temps où le parti se dénommait : Mouvement de la société islamique”, remarque fièrement un des membres de la direction historique. Il a également siégé dans le gouvernement Ouyahia, puis dans ceux de ses remplaçants, en qualité de secrétaire d'Etat à la Pêche, ministre de la PME-PMI et, enfin, ministre du Travail. Ceux qui ont parrainé sa candidature étaient mus par le souci de préserver, au moins dans un premier temps, la stature d'un mouvement devenu incontournable sur la scène politique grâce, évidemment, à la politique de “modération et d'entrisme” pratiquée par Nahnah. Cette stature ne pouvait être maintenue qu'à travers l'élection d'un homme connu en dehors du parti, respecté et craint à l'intérieur. Soltani a, sitôt élu, promis de rester fidèle à la voie tracée par son prédécesseur. “Je prends l'engagement de continuer à bâtir sur sa ligne, ses amis seront mes amis et, ne l'oublions pas, la consultation est la base de notre politique”, a-t-il dit. Plus que tous les autres, c'est lui qui représente et symbolise la ligne radicale au MSP. Mais Abdelkrim Dahman, président du bureau de ce IIIe congrès, balaie cette version : “Nous demeurons attachés à nos valeurs ; le parti a grandi, les défis sont devenus multiples, cela nous impose d'élargir nos instances et de les renforcer sans pour autant adopter une nouvelle ligne de conduite. Nous avons eu le courage de prôner la modération au moment où l'extrémisme était à la mode, ce n'est pas aujourd'hui que nous allons changer.” Bouguerra est défini, d'ailleurs, comme un homme ouvert au dialogue, toujours disponible et prêt à écouter les autres. Le nouveau président sera entouré de trois vice-présidents : Abderrahmane Saïdi, Abderrazak Mokri et Abdelmadjid Menasra disqualifié de la course pour n'avoir pas atteint la plénitude de ses quarante ans. L'autre parrain de Soltani, Mohamed Megharia, a été élu président du conseil consultatif. Le bureau exécutif sera incessamment formé parmi les membres du conseil consultatif. L. B.